Chronique de Misha

     J’aime beaucoup l’univers de Michel Ocelot. Il crée toujours des univers chamarrés à travers des contes savamment construits. Après l’iconique Kirikou, j’ai adoré Princes et Princesses, Azur et Asmar, puis Les Contes de la nuit. Le Pharaon, le Sauvage et la Princesse est sorti en 2022. Alors, qu’est-ce que j’en pense ?

3 Contes

     À l’instar de son prédécesseur, ce film se divise en 3 parties, chacune racontant un conte différent. Tout commence sur un chantier bruyant. Les ouvriers fatigués se regroupent tous ensemble pour une pause bien méritée. La Conteuse leur propose d’inventer des histoires. Elle écoute les idées de tous ces gens si différents aux souhaits disparates, ce qui l’inspire. Elle mélange tous ces éclats d’imagination pour assembler le Conte du Pharaon.

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     Cette première histoire met en scène une régente autoritaire qui empêche sa fille de se marier afin de conserver le pouvoir. Mais la jeune fille est amoureuse et souhaite épouser l’élu de son cœur. En ricanant, sa mère lui promet que seul Pharaon pourra l’épouser. Alors, la jeune fille demande à son amant de briguer ce titre pour qu’ils puissent enfin s’unir. Le jeune homme hésite, demande conseil aux Dieux, et tout son périple sera jalonné d’offrandes à leur attention afin de le guider dans ses choix.

     Au gré de son voyage, il se montre bon envers les gens affamés et récolte le soutien, à la fois du peuple, mais aussi des prêtres en restaurant leur Temple. Ses offrandes balaient leurs dernières réticences, ils l’acceptent en tant que nouveau Pharaon. Le jeune homme se rend aux portes du palais. Et finalement, il se montre très sage.

     Le Conte met en avant la foi, la manifestation divine à travers ce que l’on entreprend, notre force intérieure. Il y a un véritable message sur nos convictions profondes, ce que l’on peut accomplir en y croyant.

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     Le deuxième Conte se déroule en Auvergne. Il met en scène un petit garçon, fils d’un monarque tyrannique. Il ne peut rien faire sans se faire gourmander. L’enfant joue seul avec sa balle. Elle tombe régulièrement dans la geôle du prisonnier qui lui renvoie, après avoir échangé quelques mots. Au fil du temps, l’enfant se rapproche de lui en descendant le voir chaque jour. Il découvre que son père l’a emprisonné injustement. Il décide alors de dérober les clés pour le libérer.

     Le Roi condamne le bourreau, persuadé qu’il est responsable de l’évasion de son prisonnier. Mais son fils avoue que c’est lui qui a libéré le brave homme. Alors le Monarque décide de le faire exécuter. Seulement, les hommes qu’il assigne à cette tâche s’y refusent, abandonnent l’enfant dans la forêt en lui laissant de quoi subsister. L’enfant grandit, jusqu’à devenir Le Beau Sauvage. Il vole les riches pour redistribuer aux pauvres.

     Bien évidemment, le Roi ne sait pas qu’il s’agit de son fils. Je ne partage pas la moralité de la fin cette fois. À chacun sa vision des choses.

     Le 3ème Conte, certainement mon préféré, parle d’un Prince qui refuse son Destin. Pour échapper à ses responsabilités ainsi qu’à son mariage imminent ; il devient vendeur de beignets. Par un concours de circonstances, un homme du palais lui commande ses pâtisseries et les trouve tellement bonnes qu’il lui demande d’en livrer à La Princesse des Roses, qui s’avère être sa promise. Le jeune homme se rend au Palais et prépare davantage de beignets au fil des jours.

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     La mystérieuse jeune femme l’intrigue beaucoup. Elle aspire à une vie de simplicité et préfère de loin tomber amoureuse d’un vendeur de beignets, les Princes l’ennuient !

Costumes fidèles

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     Les costumes sont travaillés, il y a une vraie recherche par rapport au pays d’origine. Les couleurs chatoient, les formes, les coupes ; tout invite au voyage.

     Le deuxième Conte se calque sur le film Les Contes de la Nuit : les personnages sont animés sous forme d’ombres, déambulant dans des décors colorés. Tous les personnages sont sombres, seuls leurs yeux sont visibles, ainsi

que leurs vêtements en couleurs. Un choix artistique délibéré que Michel Ocelot affectionne tout particulièrement. Et peut-être aurait-il mieux valu adopter ce rendu artistique pour les deux autres Contes, car le cel shading employé ne rend clairement pas honneur au film, malheureusement. Et c’est fort dommage.

     Les comédiens de doublage surjouent par moments, ce n’est pas excessivement gênant, puisqu’il s’agit ici de Contes. Mais j’imagine mal des personnes parler avec cette intonation au naturel.

     La bande-son colle bien aux scènes. Je retiens surtout celle du troisième Conte, bien évidemment. La petite danse des serveuses quand elles se déplacent, avec une perspective éloignée pour vraiment profiter des décors du Palais. Le chant de la Princesse était joli aussi.

     J’ai adoré une séquence en particulier : quand la narratrice marque une pause entre deux Contes, en expliquant qu’une histoire se savoure. Il y a un flottement, un court silence pour rêver à ce qu’on vient d’entendre avant de découvrir l’univers suivant. C’est un peu comme un bon livre, on ne va pas en ouvrir un autre à peine le dernier chapitre terminé. On va y repenser un peu, beaucoup même. Le temps de le savourer pleinement.