Vampire: The Masquerade – Swansong est un RPG narratif issu du studio indépendant français Big Bad Wolf, que vous connaissez sans nul doute pour son précédent projet : The Council, une aventure narrative épisodique ayant connu un joli petit succès en 2018.

Quatre ans plus tard, ils reviennent sous le label d’édition Nacon pour un jeu estampillé Vampire: La Mascarde. Une excellente nouvelle pour quiconque connaît un minimum l’univers et la qualité des productions vidéoludiques qui en découle généralement.

Plutôt bien accueilli par la presse et les joueurs, Vampire: The Masquerade – Swansong débarque cette fois-ci dans une version spécifique pour Nintendo Switch. Une année supplémentaire a-t-elle permis au studio de vous livrer un portage de qualité ? C’est ce que je vous propose de découvrir tout de suite.

Editeur(s)
Nacon
Sortie France
28 sept. 2023
PEGI
+18 ans
Liens Site Officiel
Support de test Nintendo Switch

Le Pouvoir des Trois

Vampire: The Masquerade – Swansong s’impose dès le départ comme un projet hors norme et bien différent des productions usuelles issues du célèbre Jeu de Rôle. Vous n’y incarnez non pas un, mais bien trois vampires issus de clans différents dans une histoire incroyablement riche en rebondissements et aux fins multiples.

Tout commence par le déclenchement du Code Rouge, synonyme de crise majeure dans la Camarilla de Boston. Trois éminences du Monde des Ténèbres sont alors réunies pour mener l’enquête sur un meurtre qui met en péril toute la société vampirique.

Galeb, du clan Ventrue, est nul autre que la Main du Prince Hazel, l’un des vampires les plus puissants, redoutés et respectés de la ville. Rien que ça.

Emem, vampire de 12e génération du clan Toréadore et égérie de la jaquette du jeu, s’impose comme une femme libre et indépendante n’hésitant pas à braver la Camarilla.

Enfin, Leysha est une Malkavienne, mère d’une fille également transformée en vampire, tiraillée entre son allégeance au Prince et son amour maternel. Elle a une place de choix au sein de la Cour, puisqu’elle est capable de voir le futur.

Il est sans doute important d’effectuer une première pause dans le récit. Comme vous pouvez le constater, Vampire: The Masquerade – Swansong ne vous fait pas incarner de nouveaux-nés tout juste infantés. Tout au contraire, votre groupe est constitué d’anciens, de figures déjà bien implantées dans l’univers, ayant un vécu particulièrement lourd et une connaissance approfondie de l’univers qui les entoure.

Ce parti pris va à l’encontre de l’intégralité des jeux estampillés Vampire: La Mascarade pour le plus grand plaisir des fans. Pour une fois, vous n’êtes pas considéré comme un néophyte et êtes invités de fait à découvrir des facettes radicalement différentes du Monde des Ténèbres.

Le corollaire négatif est logique : si vous connaissez peu ou mal l’univers dans lequel se déroule Vampire: The Masquerade – Swansong, oubliez toute velléité d’y jouer. Très obscur et bourré de termes issus du Jeu de Rôle, il peut facilement perdre quiconque n’a pas déjà fourbi ses armes au sein des coteries.

Certes, un glossaire est présent au sein du titre pour vous aider… mais l’implication demandée est ici tout simplement disproportionnée, tant le jeu s’adresse à une partie spécifique des joueurs. C’est bien simple, si vous vous lancez dans l’aventure sans savoir à quoi vous attendre, préparez-vous à passer beaucoup de temps dans les menus et à devoir faire un effort considérable pour raccrocher les wagons des différentes intrigues.

En termes d’écriture, Vampire: The Masquerade – Swansong est tout simplement une pépite narrative. Un titre exceptionnel en provenance d’une équipe visiblement totalement fan de l’univers de base, connaissant le lore et les mécaniques sur le bout des doigts et ayant à cœur de proposer l’expérience la plus immersive possible. Avec ses nombreux embranchements et fins multiples, le titre dispose également d’une rejouabilité énorme.

Le plus impressionnant dans Vampire: The Masquerade – Swansong vient sans doute non pas de ses héros (qui ont tous un charisme fou), mais bien dans le traitement de ses personnages secondaires. Chacun semble disposer d’un background complet et complexe, riche d’une foultitude d’informations dont vous n’aurez jamais connaissance et qui influent directement sur leur manière de se tenir, leur langage ou leurs connaissances. Un travail d’orfèvre orchestré avec le plus grand soin et qui laisse totalement pantois à chaque interaction.

Entièrement doublé en anglais, on regrettera cependant des sous-titres excessivement petits et difficiles à lire, rédhibitoires pour une partie du public souffrant de problèmes de vue. Particulièrement impactant en « mode docké », ces textes vous contraignent à forcer sur vos yeux pour ne serait-ce qu’être déchiffrés. Jouer en mode portable est donc une solution plutôt satisfaisante, et même vivement recommandée.

Pas mal, non ? C’est français

Que serait une écriture soignée si le reste ne suivait pas ? Dans Vampire: The Masquerade – Swansong, vous êtes invité à pénétrer dans un monde d’une richesse hors norme, magnifié par une mise en scène souvent très inspirée et qui ose un dynamisme cinématographique.

Bien entendu, les décors sont au diapason et la direction artistique globale est là pour le prouver. Quel que soit la scène que vous allez vivre, de nombreux détails issus de l’univers viennent magnifier la cohérence diégétique de l’œuvre. Les environnements, très diversifiés malgré l’ambiance de fantaisie urbaine, sont luxueux et lourds de personnalité.

Le tout est servi accompagné de doubleurs impliqués et maîtrisant leur incarnation à la perfection et d’une bande-son tantôt rock, tantôt orchestrale, collant à chaque séquence avec une précision chirurgicale.

Il est difficile de ne pas être dithyrambique en parlant de ce Vampire: The Masquerade – Swansong… et pourtant, le cœur du titre n’a pas encore été abordé.

Car vous n’êtes pas devant un vulgaire Visual Novel, mais face à ce qu’il convient de définir comme un véritable RPG narratif. Le genre prend ici tout son sens, puisque les mécaniques de gameplay (directement issues du Jeu de Rôle) sont au cœur de l’aventure.

Tout au long de votre progression, vos héros vont en effet gagner de l’expérience, des niveaux et des points de compétences. Ces derniers peuvent être librement attribués dans diverses connaissances et capacités (Rhétorique, persuasion, technologie, érudition, sécurité, déduction, intimidation… la liste est longue et parlera immédiatement aux joueurs aguerris du Monde des Ténèbres) et utilisés à loisir lors des échanges.

D’ailleurs, la « fiche de personnage » est une adaptation stricte de celle présente dans la 3e édition de La Mascarade, reprenant à l’identique cette mise en forme typique utilisant des cercles à remplir pour représenter les points attribués. Seuls les attributs de combats sont retirés.

Car la singularité de Vampire: The Masquerade – Swansong vient de ses « affrontements ». Plutôt que de vous proposer des combats classiques entre créatures immortelles, le studio a choisi de mettre en scène de véritables joutes verbales. Ces fameux points distribués au préalable vous servent alors à charmer, intimider ou simplement « vaincre » votre adversaire avec un argument judicieusement placé. En cas de difficulté, vous pouvez même puiser dans vos points de volonté et de faim pour améliorer temporairement votre verve.

Le titre prend également bien entendu en compte la notion de sang et, de facto, de nourriture. Durant vos explorations, vous allez pouvoir rencontrer des humains à croquer. Peu nombreux cependant, il va falloir économiser cette précieuse ressource pour éviter de tomber à court au pire moment.

Si au début de l’aventure ces possibilités sont assez limitées, à force de progresser, vous allez débloquer de très nombreuses possibilités d’aborder les chapitres de manières différentes. Et de nouveau, la qualité globale de l’écriture (et de l’œuvre en général) donne indubitablement envie de reprendre le titre, afin de découvrir toutes les subtilités pensées par les développeurs.

Une version Switch sacrifiée

C’est l’arlésienne qui continue de faire jaser les plus revêches d’entre vous. Comment faire tourner un jeu aussi beau et ambitieux sur Nintendo Switch ? Si des exemples ont su démontrer toutes les capacités de la machine (The Witcher 3, Red Dead Redemption, Dying Light) ; il est clair que d’autres ne sont clairement pas au niveau (The Outer World, Dynasty Warriors 9: Empires ou le tout récent Mortal Kombat 1).

Quid de ce Vampire: The Masquerade – Swansong ? Eh bien, malheureusement, il se situe très clairement dans la seconde catégorie. Malgré l’année prise par les développeurs afin de s’occuper de ce portage, force est de constater que le résultat ne rend clairement pas hommage à la grandeur de leur titre.

Les concessions prises pour faire tourner le jeu sont tout simplement trop importantes pour le conseiller à qui que ce soit. Visuellement catastrophique, techniquement délicat ; le jeu est un calvaire à suivre. Et les problèmes commencent tôt, très tôt, trop tôt… dès le chargement des crédits initiaux. Même les logos des différentes entreprises au lancement souffrent de lags, suivis d’un écran noir de plusieurs très longues secondes !

C’est bien simple : si vous n’êtes pas au fait de ces lacunes d’optimisation, vous risquez de penser que le jeu a tout simplement cessé de fonctionner. D’expérience personnelle, la première fois j’ai même redémarré la console, persuadé d’un crash complet de la machine.

Une fois en jeu, heureusement la fluidité revient et les chutes de fréquences d’images se font plus rares… mais au détriment de la qualité graphique. Les personnages semblent modélisés à la serpe, l’aliasing et le clipping sont omniprésents, chaque protagoniste tient plus de la bouillie de pixels.

Seuls vos héros s’en sortent mieux, sans pour autant particulièrement briller. Il en va de même pour l’intégralité du titre : les décors ont perdu pratiquement toutes leurs couleurs et leurs textures, pour ne plus afficher que des environnements plats et sans âmes.

D’une manière générale, Vampire: The Masquerade – Swansong est pratiquement injouable en l’état sur TV. Seul le mode portable s’en tire un poil mieux, sans pour autant pouvoir être qualifié de réussi.

J’aime

L

Une adaptation quasi-parfaite

L

Des personnages ultra détaillés

L

Un système d’affrontement original et prenant

L

De nombreux embranchements et fins

L

Des doubleurs très impliqués

L

Une intrigue prenante

J’aime moins

K

Cette version Switch, qui ne rend clairement pas hommage à toutes les qualités du titre