Silent Hope est la dernière production intégralement signée (développée et éditée par) Marvelous, qui se montre décidément particulièrement prolifique cette année en productions de qualité.

Après nous avoir régalés avec d’excellents jeux comme Loop8: Summers of Gods, Rune Factory 3 Special ou encore le remake de Story of Seasons: A Wonderful Life ; le géant nippon conclut cette série de remarquables sorties avec ce qui convient tout simplement de considérer comme l’un de ses chefs-d’œuvre.

Un titre incroyable, d’une richesse rare, réalisé avec un talent indéniable et que je vous propose de découvrir sans plus tarder.

Editeur(s)
Marvelous
Sortie France
03 oct. 2023
PEGI
+12 ans
Liens Site Officiel
Support de test Nintendo Switch

 

Enjoy the Silence

Il était une fois un royaume où tout le monde vivait heureux. Sous la houlette d’un roi bon et généreux, ses habitants coulaient des jours paisibles, loin des affres de la guerre et des vicissitudes de la vie.

Mais un beau jour, sans que nul ne comprenne pourquoi, le Roi déroba les mots et se jeta de lui-même au plus profond d’un abîme infini. Sa fille, la Princesse, pleura tant que ses larmes finirent par se cristalliser, l’enfermant à jamais dans un cocon de mélancolie.

Les années passèrent, sans que personne ne puisse jamais libérer le royaume de cette malédiction, jusqu’à ce que cette histoire devienne un mythe.

C’est alors que la princesse se réveilla. Bien que toujours prisonnière, sa Voix parvint à s’élever, appelant à elle sept héros muets. Tous la rejoignirent, prêts à tout pour explorer l’abîme, retrouver le roi et enfin mettre un terme à cette malédiction.

Vous incarnez ces protagonistes, dans une quête dangereuse et éperdue consistant à explorer les profondeurs insondables de cet abîme ténébreux, uniquement guidé par la voix et les souvenirs de la Princesse.

Silent Hope… est une merveille de narration. En faisant le choix de ce scénario poétique grandement inspiré des contes de fées, Marvelous est parvenu à livrer ici un travail tout simplement remarquable. Vos diverses explorations et découvertes sont uniquement émaillées par la voix de la Princesse, qui déroule ainsi le scénario par le prisme de ses propres souvenirs et autres anecdotes d’un passé inconnu pour vos héros.

Au gré de vos découvertes, vous allez en apprendre davantage sur ce qu’est réellement cet abîme, ainsi que les raisons qui ont motivé le Roi à fuir en volant les mots. Une idée merveilleuse, originale à souhait et diablement immersive ; qui parvient en ne donnant la parole qu’à un seul et unique personnage à vous happer dans une intrigue riche en rebondissements et en découvertes.

Si l’on ne devait faire qu’un seul reproche au titre, ce serait sans nul doute que la Princesse est un poil trop loquace. Il aurait été encore plus agréable de n’entendre sa voix qu’à des moments clés de l’intrigue, sporadiquement, comme si l’utilisation du moindre mot était un exploit, à la limite de la souffrance exacerbée d’un monde soumis à un silence assourdissant.

Marvelous a, au contraire, fait le choix de rendre son jeu bien plus « vivant » par l’intermédiaire des (nombreuses) réflexions et interjections de cette dernière sur… tout et n’importe quoi. Elle parle tout le temps, comme si finalement le mal qui pesait sur le monde n’était qu’un détail.

Certes, elle ponctue régulièrement ses interventions par des excuses lorsque, par maladresse, elle vient à vous poser une question à laquelle vous ne pouvez pas répondre. Certes encore, on comprend au prisme de cette histoire que cette dernière utilise sa voix nouvellement retrouvée à outrance, comme le seul lien qu’elle a encore avec le monde qui l’entoure après des décennies vouées à une solitude extrême.

Malgré tout, il aurait été préférable que ses interventions soient un poil moins nombreuses afin de rendre le titre encore plus mystérieux et poétique.

Seven Wonders

Dans Silent Hope, vous avez le choix d’incarner l’un des sept héros muets venus prêter assistance à la princesse, à votre libre choix. Chaque plongée dans l’abîme vous laisse toute liberté de déterminer qui vous allez incarner, ainsi que ses équipements.

Déconcertant au début, le choix du héros prend rapidement tout son sens à mesure que vous plongez de plus en plus profondément dans cet antre de ténèbres.

Car tous sont bien différents, disposant d’un gameplay propre, de forces et de faiblesses spécifiques. Vous allez ainsi pouvoir incarner :

Le voyageur, classe polyvalente et généraliste, armé d’une épée et d’un bouclier. Capable d’assommer ses adversaires à l’aide de sa targe ou d’effectuer une attaque tournoyante, il représente un choix initial intéressant pour découvrir les bases du gameplay.

Le magicien : capable de lancer de puissantes attaques à distance, de créer un dôme gravitationnel attirant les ennemis ou d’envoyer des sorts de zones particulièrement mortels, il pêche cependant par une défense et des points de vie très faibles.

L’épéiste est une jeune femme se battant à l’aide de deux dagues. Incroyablement rapide, capable de se téléporter sur les ennemis et de transpercer, elle brille par sa maîtrise de l’environnement et du placement, moins par sa capacité à résister aux attaques ennemies.

La Forgeronne est une force de la nature maniant une lourde épée à deux mains. Dégâts colossaux, capable de se défaire de groupes entiers d’ennemis avec une déconcertante facilité ou de se ruer sur ses adversaires ; elle est particulièrement lente.

L’Archer est la seconde classe à distance. Un combattant rapide, capable de faire pleuvoir la mort sur les monstres, mais également pénalisé concernant sa défense.

La fermière est une classe incroyablement satisfaisante à jouer. Aussi polyvalente que le voyageur, elle se concentre sur des dégâts à cibles uniques avec une très bonne portée.

Enfin, l’Artiste Martiale est une classe de corps-à-corps devant se mettre au contact de ses adversaires pour leur infliger des dégâts rapides et impressionnants, au détriment de sa propre sécurité.

Chacun de ces héros dispose de forces et de faiblesses qui s’équilibrent entre elles, entre dégâts individuels ou de zone, portée et vitesse d’attaque, puissance brute et défense, points de vie ou rapidité des compétences.

Aucune ne brille plus qu’une autre, toutes ont été travaillées avec le plus grand soin et vous sont d’une aide précieuse tout au long de votre périple. Il est d’ailleurs indispensable de penser à les faire progresser simultanément pour ne pas se retrouver bloqué dans une zone particulièrement retorse nécessitant de faire appel à l’un ou l’autre.

Car leur progression est également séparée. Lorsque vous décidez d’incarner l’un de ces héros, les autres restent au camp de base, s’affairant à vous aider pour vos prochaines explorations.

Il n’y a, de fait, que votre personnage « actif » qui gagne de l’expérience. Et si dans les premiers temps cette mécanique peut sembler particulièrement contraignante en imposant de refaire les premiers niveaux avec l’ensemble du casting ; elle prend rapidement tout son sens. Car plus vous avancez, et moins le besoin de les faire évoluer séparément se fait ressentir.

En effet, vous allez régulièrement trouver des cristaux lors de vos explorations. Ces derniers vous permettent soit de remonter à la surface en mettant un terme à votre expédition, soit de changer à la volée de personnage jouable tout en octroyant à ce remplaçant un bonus significatif.

Par exemple, changer de la Forgeronne pour le Voyageur lui octroie une amélioration énorme des dégâts, l’épéiste augmente sensiblement la vitesse d’attaque, etc.

Une réelle synergie dans le choix de vos personnages est donc indispensable afin de progresser toujours plus avant avec aisance, au risque de vous retrouver dans une situation particulièrement inextricable.

Chacun de vos héros peut, de plus, débloquer deux autres classes secondaires. La première se déverrouille lorsque ce dernier atteint le niveau 15, la dernière uniquement après avoir terminé une première fois le jeu.

Car oui, Silent Hope n’est pas un jeu particulièrement long… du moins dans sa première partie. Une fois le fond de l’Abîme exploré et le scénario terminé, vous pouvez recommencer depuis le début tout en conservant votre progression. Le jeu est alors bien plus difficile, de nouveaux monstres font leur apparition et, bien entendu, le loot est au diapason.

Pensé pour être joué sur la durée, Silent Hope est un jeu qui ne se laisse pas de côté si facilement.

Heigh-ho heigh-ho, on rentre du boulot

Non content de disposer de cette richesse tant sur le plan scénaristique que de gameplay, chacun de vos héros se voit attribuer un rôle lorsqu’il reste au camp de base. Six postes de travail sont judicieusement disposés au sommet de l’abîme, afin de vous aider dans votre progression.

À gauche, vous allez trouver la forge, l’atelier (afin de raffiner le bois) et le laboratoire (qui s’occupe du taillage des pierres).

À droite se trouvent la ferme, les champs et la cuisine.

Mais à quoi diantre tout cela peut bien servir ? Eh bien, là est encore une énième idée de génie de Silent Hope.

Lors de vos explorations de l’Abîme, vous allez pouvoir trouver divers équipements et matériaux. Mais aucun n’est utilisable en l’état. Profondément ancré dans une logique diégétique sans ombrage, Silent Hope vous permet en effet non pas de récupérer des armes et des armures… mais des « souvenirs » de ces derniers.

Pour les utiliser, il va donc falloir les forger. Chacun nécessite divers matériaux, récoltés également lors de votre périple. Mais de nouveau, pas en l’état. Avant de pouvoir utiliser un type de bois par exemple, il faut le tailler. Et il en va de même concernant les pierres.

Cette progression « limitée » de vos équipements vous demande donc, moyennant une certaine somme d’argent et un temps imparti (en jeu), de confier vos précieuses ressources aux postes de travail liés.

Et il en va bien entendu de même concernant la cuisine. Les aliments vous octroient des bonus importants, mais doivent au préalable être préparés.

Vos équipements peuvent également être, une fois forgés, améliorés via un système de pièces détachées. En détruisant vos anciennes possessions, vous allez pouvoir en récupérer et rendre plus puissantes vos armes et armures.

Enfin, il est possible d’y incruster diverses gemmes afin de les doter de bonus spécifiques, comme des dégâts élémentaires, une augmentation d’expérience, de dégâts, etc.

Mais si toutes ces mécaniques sont en place, ce n’est pas sans raison.

Made in Abîme

Vous y voilà. Devant ce gouffre ténébreux, prêt à faire l’ultime pas en avant. C’est désormais certain, l’Abîme vous appelle. Et vous allez répondre.

Cet immense et unique donjon est découpé en six biomes, chacun disposant d’un nombre de niveaux croissants et se terminant par un boss particulièrement puissant. Mais avant d’en arriver là, il va falloir croiser le fer.

Silent Hope est un Action-RPG, c’est-à-dire que vous contrôlez directement votre personnage lors de combats dynamiques. Le gameplay se veut particulièrement simple, sensiblement identique entre l’ensemble des héros, et donc facile à prendre en main.

Le stick analogique gauche vous permet de vous déplacer, la gâchette droite d’utiliser une potion (en nombre limité) et la droite d’effectuer un « dash » pour esquiver ou au contraire vous rapprocher de l’ennemi. Le bouton A lance une attaque directe, B, X et Y peuvent être attribués à une compétence.

La première impression, et sans doute l’un des rares défauts du titre, est son manque de « blocage ». Vous ne pouvez, en effet, même avec le voyageur pourtant équipé d’un bouclier, pas parer les attaques de vos ennemis. Pour ne pas subir de dégâts, il faut donc esquiver… et le timing peut se montrer particulièrement serré !

Silent Hope souffre également d’une maniabilité un peu rigide, surtout lors de l’exploration de niveaux pour lesquels votre héros n’est pas « optimisé ». Comprenez par là que les ennemis sont tous sensibles à un type d’attaque (spécifique en fonction de l’arme utilisée ou des compétences), ainsi que potentiellement à un élément.

Utiliser l’épéiste et ses doubles dagues équipées d’une gemme de foudre va grandement vous simplifier la vie contre certains types d’ennemis… et au contraire rendre les affrontements contre d’autres particulièrement longs et difficiles.

Il aurait de fait été intéressant de pouvoir explorer l’abîme en multijoueur ou, à minima, de pouvoir changer de personnage « à la volée ». Cela n’étant pas le cas, il faut composer avec ces limitations et savoir se montrer prudent pour ne pas tout perdre.

Votre exploration est sauvegardée via des feux de camp, débloqués à certains niveaux spécifiques. Si vous ne parvenez pas à atteindre ces derniers, tout retour à la surface vous oblige à reprendre depuis le début du biome. Une idée qui sur le papier peut sembler déplaisante mais qui, une fois au cœur du jeu, est incroyablement judicieuse.

Comme expliqué dans une précédente section, vos personnages disposent d’une forte synergie en pouvant se donner des bonus intéressants. Et il est parfois assez difficile d’accepter le retour, au risque de devoir reprendre sans jouir justement de ces améliorations.

Mais là où le stress prend le dessus, c’est qu’en cas de défaite non seulement vous perdez votre progression… mais également une partie de votre butin ! Voir tomber une arme légendaire à cause d’un excès de confiance est une véritable déception, d’autant que ces dernières ne sont pas récupérables en revenant à l’endroit de votre trépas.

Mieux encore, votre exploration est émaillée de défis en tout genre renouvelant l’expérience à chaque fois. Que ce soit via des statuts qui vous demandent de remplir des conditions spécifiques, des portails vous menant dans des zones remplies de monstres surpuissants mais abritant des trésors merveilleux, ou encore d’autres événements aléatoires ponctuant chacune de vos plongées.

Silent Hope dispose d’un principe d’exploration tout bonnement excellent, qui se renouvelle sans cesse et parvient à l’exploit de ne jamais lasser. Par quelle sorcellerie ? Eh bien, parce que le titre a l’intelligence de ne pas être trop long !

Atteindre la fin d’un biome, vaincre son boss et passer au suivant est chose relativement aisée pour qui maîtrise les arcanes du titre… mais refaire encore les mêmes zones et boss peut également revêtir un grand intérêt, afin de récupérer armes et matériaux nécessaires à votre progression.

Et si cela ne nous suffit pas, une fois l’abîme intégralement bouclé, vous pouvez vous lancer dans les modes de difficultés supplémentaires avec de nombreux bonus à la clef…

Un jeu de fan, ou pour les fans ?

Visuellement, Silent Hope est une claque. Non pas celles que vous infligent les dernières productions Triple-A bourrées de technologies, mais celles qui marquent indubitablement.

Chaque biome vous transporte dans une saison et une époque différente, forte de ses rouages et mécanismes, pièges et autres idées de mise en scène particulièrement avenantes.

Disposant d’un style « chibi » particulièrement adapté à la Nintendo Switch, le titre ne souffre jamais du moindre petit lag ou chute de framerate. L’optimisation est tout simplement parfaite, de même que son aspect visuel est irréprochable.

Mieux encore, les amoureux de Marvelous, les connaisseurs et autres amateurs éclairés, vont retrouver de très, très nombreuses références à leurs jeux passés. Que ce soit via les animaux ou certains monstres, directement issus de Story of Seasons ou de Rune Factory.