Dernier jeu du petit studio de développement belge Appeal, Gangs Of Sherwood se présente sous la forme d’un jeu vidéo, à paraître le 30 novembre 2023.

Pour la petite histoire, il s’agit tout simplement d’un des titres que j’attendais le plus cette année depuis sa première présentation lors de la Nacon Connect en mars.

Et si le concept même du titre est intéressant, force est de constater que la réalisation peine à suivre. Manque de temps, de moyens ou simplement de talents ; nous ne le saurons jamais. Mais une chose est certaine cependant : c’est que le résultat est voué aux gémonies.

Chronique d’un échec annoncé.

Un drame en trois actes

Gangs Of Sherwood est une réécriture du mythe de Robin des Bois par une équipe qui n’a, visiblement, absolument rien compris ni même cherché à se renseigner un minimum.

Parodie malencontreuse et involontaire d’un personnage de légende ayant traversé toutes les générations, le titre d’Appeal Studio s’échoue dès les premiers instants dans une narration inutilement verbeuse et au travers d’une logorrhée archétypale du pire effet.

Vous incarnez bien entendu Robin et ses potes devant libérer la perfide Albion des griffes acérées du vil Shérif de Nottingham… et, sur un plan purement scénaristique, rien ne va. Un tel carnage qu’il est même assez difficile de savoir par où débuter une quelconque critique.

L’histoire vous est racontée selon plusieurs « points de vue » différents, dans un gloubiboulga narratif tout sauf maîtrisé. D’un côté, vous allez suivre l’aventure en tant que protagonistes (soit en incarnant l’un des quatre héros)… et dans le même temps, une partie de l’intrigue vous est présentée sous forme de pièce narrée par un marionnettiste qui s’est, visiblement, trompé de jeu.

Ce changement constant de point de vue est une plaie qui perd le joueur plutôt qu’il ne sert le récit, une erreur basique qui ne devrait tout simplement pas avoir sa place dans un quelconque récit, quel qu’en soit la forme, et qui laisse à penser que le studio n’a absolument, à aucun moment, cherché à faire appel aux services d’un spécialiste.

Écrire une bonne histoire… c’est comme réparer une fuite. Tout le monde peut le faire ; mais sans réelles connaissances ni maîtrise, au mieux vous allez simplement effectuer un travail de surface qui va exploser au premier choc thermique.

Eh bien ici, c’est exactement le cas. L’équipe en charge du jeu ne sait, tout simplement, pas raconter une histoire et ne maîtrise absolument pas les codes les plus fondamentaux de la narration.

Et si ce n’était que sur la forme qu’il y avait à redire… mais le fond n’est guère mieux. Au gré de vos pérégrinations, vous allez de découvertes en tourments, les yeux écarquillés devant les maladresses, poncifs éculés et autres bêtises crasses inconséquentes ajoutées à la va-vite et sans la moindre logique diégétique.

C’est bien simple : si la séquence d’introduction laisse prévoir le meilleur, dès la fin du premier chapitre, vous avez l’impression de lire le résultat d’un Cadavre Exquis fait lors d’une soirée trop alcoolisée.

L’intrigue part dans tous les sens. L’histoire de base est celle de Robin, fondant un gang afin de défaire le Shérif dans un univers empruntant aux codes du Steampunk… mais également intégrant des éléments magiques qui ne sont jamais justifiés ni expliqués. Par-dessus cela, ajoutez la Pierre Philosophale, des bateaux à vapeur, des robots et autres collecteurs de taxes surfant dangereusement sur une planche très, très glissante en arborant des caractéristiques physiques… particulières. À la fin, Gangs Of Sherwood ressemble à s’y méprendre à une partie de Kamoulox qui aurait mal tourné.

Mais peut-être le gameplay parvient-il à sauver le jeu du naufrage… ?

Le Gloubiboulga continue

Gangs Of Sherwood est présenté, sur le site officiel et dans les communications, comme un jeu d’action/aventure coopératif en ligne.

De mon côté, j’ai grande peine à le catégoriser avec autant d’entrain, tant le titre cherche à puiser dans tous les genres. À l’instar de son scénario, il se perd rapidement dans un melting-pot d’idées venant de partout (et surtout de nulle part) afin d’offrir une expérience « originale » mais qui, en définitive, ressemble simultanément à toutes les autres… et à rien du tout.

Mais revenons au début.

Au lancement, le titre vous demande de choisir entre le mode en ligne et hors ligne. Car oui, si Gangs Of Sherwood est bel et bien un jeu coopératif, n’espérez certainement pas un quelconque mode local. Ici, vous pouvez partir à l’aventure avec un maximum de trois amis disposant chacun de leur console et d’un exemplaire du titre.

La petite cerise sur le gâteau, c’est qu’il est impossible de lancer une partie entre amis « à la volée ». Vous devez impérativement, depuis le menu principal, activer le mode multijoueur ; ce qui vous impose de quitter votre partie en cours si vous souhaitez simplement profiter du titre à plusieurs.

Une fois votre choix effectué, le jeu vous demande de décider du personnage que vous allez incarner. Au nombre de quatre, ces derniers sont Robin, Marianne, Frère Tuck et Petit Jean…

Et autant vous le dire tout de suite : si vous jouez en solitaire, vous DEVEZ incarner Robin. Pourquoi ? Eh bien tout simplement car c’est le seul à pouvoir utiliser des armes à distance, pardi ! Certes Marianne dispose également de dagues de lancer, mais leur utilisation est moins fluide et va nécessiter une prise en main rageante ; ce qui a pour effet de rendre le moindre petit combat à distance particulièrement frustrant.

Car oui, par moment, certains adversaires vont vous attaquer depuis une position surélevée particulièrement difficile à atteindre. Les personnages forts au corps à corps, soit Tuck et Jean, ont l’obligation de prendre des chemins de traverses afin de s’en débarrasser… et pour progresser, il est obligatoire de vaincre l’ensemble des antagonistes d’une zone.

Le bestiaire, justement, est bien entendu rachitique à souhait. 16 types d’ennemis différents aussi originaux que des gardes avec des épées, des gardes avec des arcs ; ou encore des gardes avec des boucliers.

Le jeu dans son ensemble se découpe en trois actes, plus quelques missions annexes. Très arcade dans l’esprit, Gangs Of Sherwood ne propose pratiquement aucune liberté d’exploration. Vous allez simplement parcourir des niveaux couloirs dirigistes à l’extrême disposant de quelques rares embranchements vous permettant de découvrir des trésors et autres quêtes annexes fort mal pensées.

Par moment, vous allez également découvrir des coffres nécessitant l’utilisation d’un personnage particulier pour être débloqué. Une merveilleuse idée afin de mieux exclure les joueurs solo, ou de les contraindre à recommencer un niveau entier juste pour récupérer une breloque.

Car, et c’est (encore) un écueil à l’encontre du titre, le jeu est particulièrement avare en explication et en exposition. C’est ainsi que, par vous-même, vous allez découvrir à un moment du premier niveau que certains civils sont prisonniers de cages et qu’il faut les libérer afin d’obtenir de la « faveur ». Qu’est-ce que cette fameuse faveur ? Pourquoi est-il important de la récolter ? Tout cela et bien plus encore, l’équipe de développement a choisi de ne pas s’encombrer en vaines explications.

Et ce genre de chose arrive plus souvent qu’il ne faudrait. Ainsi, allez-vous également récolter de l’argent… qui sert littéralement à tout. Eh, vous êtes Robin des Bois après tout. C’est écrit sur l’étiquette : vous volez au riche pour donner aux pauvres. Donc vous allez récolter de la moulaga partout : en tuant des ennemis, en brisant des tonneaux, en accomplissant vos missions, etc.

À chaque point de contrôle, ce bon vieux Alan A Dale (le fameux ménestrel) arrive et récupère votre précieux butin… qu’il convertit en points d’expérience ! Car oui, Gangs Of Sherwood est AUSSI un RPG. Pourquoi faire simple ?

Cette surcouche ajoutée à la va-vite est aussi explicite que le reste du jeu et ne sert pratiquement, comme tout le reste, à rien du tout. Et pour cause : vous ne disposez pas réellement d’un menu vous permettant de voir vos statistiques.

Entre chaque mission, vous pouvez dépenser une partie du butin (qui ne devait pas être redistribué aux miséreux, à la base ?) pour acheter de nouvelles techniques auprès du maître d’armes…

Et que voilà une excellente transition pour parler de gameplay.

Gerbotron 3 000

Vous voilà fin prêt à pourfendre les armées du vil Sheriff ? Grand bien vous fasse. Du courage, il va vous en falloir… mais pas forcément pour les bonnes raisons.

Chacun des quatre protagonistes dispose d’une maniabilité peu ou prou similaire, dans la plus pure tradition des jeux d’action/aventure : attaques légères sur X, lourdes sur Y, esquive sur B et saut sur A.

La petite originalité étant que chacun dispose d’un passif qui se déclenche automatiquement selon certaines conditions. Robin, par exemple, est capable d’invoquer des flèches fantômatiques (?) via un combo de X.

Assez agréable à prendre en main, Gangs Of Sherwood se laisse suivre avec plaisir justement grâce au dynamisme de ces affrontements, surtout en multi.

Où est le problème, alors ? Pour commencer, la sensibilité du stick analogique droit est BEAUCOUP trop grande. Viser à l’arc est un calvaire, il est pratiquement impossible de réussir à tirer une flèche de manière optimale. Par « chance », les développeurs – visiblement conscients de ce problème – ont ajouté une visée automatique… pratique.

Et régler la sensibilité dans les options ne change malheureusement pas grand-chose. Car s’il est alors plus simple de viser, la caméra met une éternité à tourner… très pratique dans un jeu qui demande de se retourner toutes les dix secondes car des ennemis apparaissent dans votre dos.

Mais surtout, et là est le problème principal et rédhibitoire du titre… qui, par tous les Dieux QUI au sein de l’équipe a eu l’idée absolument géniale de faire trembler la caméra à CHAQUE ACTION comme si votre personnage était filmé par un caméraman atteint de parkinson en plein tremblement de terre ?!

Vous tirez, ça tremble, vous tapez au corps à corps, ça tremble, vous sautez, ça tremble… même en brisant simplement des tonneaux, la caméra vrille dans tous les sens.

Je ne suis pas particulièrement sensible au fameux Motion Sickness ; mais j’ai dû faire des pauses régulières dans mon test pour éviter d’être malade.

J’aime

L

Beaucoup, beaucoup d'idées...

L

Jouable jusqu'à 4 en ligne...

L

Sympathique en multi

L

Plutôt jolie

L

Un gameplay plutôt agréable

J’aime moins

K

... mais mal exécutées

K

... mais aucun mode local

K

Une caméra des enfers qui tremble tout le temps

K

Un scénario totalement confus à la narration... surprenante