Chronique de Misha

     Attention, coup de cœur énorme ! Je ne connaissais pas Dawn Kurtagich et désormais, elle fait partie de mes chouchous. Sa plume est délicieuse. La partition de son texte, ses personnages très vivants et réfléchis, son scénario, finement abouti…

     Mais trêve d’éloges, je vais tout de même parler du roman !

Carly et Kaithlyn

     The Dead House met en scène une héroïne souffrant d’un TDI (Trouble Dissociatif de l’Identité) {ce que tout le monde confond d’office avec la schizophrénie…}. Carly vit le jour, elle incarne la bonne facette de sa personnalité. Kaitlyn, son alter ego, vit la nuit. Toutes deux s’écrivent des petits mots, car même si elles partagent le même corps, elles ne sont pas « intégrées » et de fait, chacune a ses propres pensées. Quand l’une veille, l’autre dort.

     Seulement voilà, de la sorcellerie bretonne rentre dans l’équation. Quelqu’un arrache Carly pour ne laisser que Kaitlyn dans son corps. Un vide brutal et douloureux. Naidah, qui pratique cet art, va essayer de stopper leur ennemi et de ramener sa meilleure amie. Mais, frayer avec un Olen est loin d’être sans conséquences…

BROK the InvestiGator

Libre interprétation

BROK the InvestiGator

     Le roman est assez singulier, dans le sens où nous découvrons cette histoire à travers des notes et des séquences vidéo. Les ¾ du temps, nous suivons le point de vue de Kaitlyn. Mais il arrive aussi que d’autres protagonistes contribuent à l’évolution du scénario. Et tout du long, même jusqu’à la fin, cette histoire demeure à notre libre interprétation. Est-ce que Kaitlyn souffre réellement de psychose ou est-ce qu’une entité agit en ce monde ? Les preuves forment une concrétion étrange, où les deux vérités coexistent.

     Il s’en dégage une poésie macabre qui m’a beaucoup séduite. De par sa fragilité, ses cassures, sa sincérité ; Kaitlyn est un personnage auquel on s’attache forcément. Toutes les épreuves qu’elle endure m’ont attristée… Une psy complètement dégénérée qui la drogue au point qu’elle sombre en état catatonique pendant plusieurs jours. Un mauvais diagnostic. Une petite sœur à qui on interdit de venir la voir pour la pousser à bout, au point qu’elle s’éloigne

petit à petit. Des médocs, toujours plus de médocs. Et même si tout ce qui se passe reste soumis à interprétation, le fait est que la faute incombe au Dr Lansing, qui la fait sombrer. Le retour de kick m’a satisfaite…

     Au début, Dead House est affilié à l’asile, puis à l’école, avant de figurer le propre esprit de l’héroïne. Il y a tellement de détails, d’interprétations… Mais rien ne reste obscur, non, c’est réellement une question d’appréciation personnelle. Pour ma part, je réfute l’hallucination collective et je penche pour l’existence de l’Olen. Après tout, Haji ne les connaissait pas, n’avait aucun lien avec eux et a vu les mêmes choses lors du 2ème « plongeon ». Bien évidemment, la caméra ne filme pas ces instants, car l’inactivité la met en veille. Ce pourquoi on peut douter comme croire du début à la fin. J’aime cette ambivalence. C’est superbement construit et j’avais deviné l’identité de l’Olen bien avant la fin. J’ai tendance à prêter attention aux petits détails. J’adore analyser, émettre des théories avant la conclusion d’une enquête. Et même si cette dernière reste en retrait par rapport à tout ce que vit Kaitlyn, elle a son importance puisqu’elle amène au dénouement, assez triste en vérité…

Une fille cassée

     464 pages, lues en quelques jours. Et je me disais « Je vais être triste quand je l’aurai fini… » C’est le cas, car il m’a imprégnée, il s’est gravé en moi. Kaitlyn est entière. Et la voir dépérir à cause de sa surmédication m’a fait horriblement mal… Je souhaitais juste qu’elle ait droit à une fin heureuse…

     Cette histoire douce-amère peut arriver à n’importe qui. Un trauma qui scinde une personne en deux ; ou pas, si l’on se réfère à la lettre d’anniversaire antérieure. Ou si, en se basant sur les accusations envers la famille, en supposant qu’elles soient vraies. Mais je pense que non, elle vivait heureuse. Carly avait déjà son alter ego à la naissance, ce pour quoi ses parents lui conseillaient de ne pas en parler. Et il n’y a aucune preuve concrète concernant l’accident. J’aurais tendance à croire que le Viking est responsable et non Kaitlyn. Si elle voulait se débarrasser d’eux, elle l’aurait fait avant, certainement pas en risquant la vie d’un garçon qu’elle appréciait. D’autant qu’elle ne haïssait pas sa petite sœur, Jaime. Je n’imagine pas non plus de mauvais parents accepter que leur ado ramène un garçon puis partager un concert tous ensemble. Non, au contraire, la présence de Jaime indique une certaine confiance. Des parents qui ont mauvaise conscience ne feraient jamais cela.

     Quand les médocs dévastent Kaitlyn, elle s’exprime de manière incohérente. Et la rage que j’ai vouée au Dr Lansing n’a fait que croître, jusqu’au dénouement. Quand je pense que tout ce que Kaitlyn a enduré, c’est à cause de cette femme… Sans elle, elle aurait pu surmonter, elle aurait continué de vivre scindée sans nuire à qui que ce soit et aurait peut-être même connu une forme de paix avec le temps. Mais hélas, il faut toujours qu’un abruti de médecin pose sa science à deux sous, en se méprenant, créant des dégâts irrémédiables… L’exemple est flagrant en l’occurrence…

     Donc oui, ce livre exploite des émotions très violentes. J’ai aimé sa franchise. Pas de faux-semblants, tout est authentique et vivant. Je crois que cette histoire me suivra de longues années, peut-être toujours. J’ai vécu un grand moment en compagnie d’une fille singulière que j’ai comprise dès la première page. Ne dites pas qu’elle est folle, elle est juste perdue à cause de ses cachetons…