Chronique de Misha

     Tearmoon Empire Story est un manga qui revisite la Révolution française sous un angle fantaisiste. L’histoire commence alors que la Princesse Mia perd la tête sous le tranchant de la guillotine. Alors que sa vie prend fin, elle reprend conscience dans son corps de jeune fille, à l’âge de 12 ans. Pensant tout d’abord avoir rêvé, son journal intime maculé de son propre sang le dément rapidement. Tout est consigné à l’intérieur et elle prend conscience qu’elle doit se servir de ces informations pour rester en vie.

     Loin de faire preuve d’altruisme, tout est calculé pour son propre confort. Ludwig, qu’elle sollicite pour son intelligence, n’y voit que du feu et pense que c’est une sainte qui se soucie réellement de son peuple. Quand Mia demande son avis à plusieurs reprises, il se sent impliqué et interprète de travers ses questions, persuadé que Mia a une conscience aiguë de l’état désastreux de son Royaume.

Un journal intime changeant

     Mia, quant à elle, s’aperçoit que son journal intime se réécrit à mesure qu’elle modifie son histoire. Elle s’occupe tout d’abord de redresser les finances, son exemple incite les nobles qui se sentent obligés de faire un geste. Puis, cet argent permet finalement de créer un hôpital dédié au quartier pauvre.

     Malgré son égoïsme crasse, Mia parvient à réaliser de bonnes actions. Mais ça ne change pas sa nature profonde. C’est bien la menace du gibet qui la contraint à changer ses choix et non une réelle prise de conscience. Il faut espérer un changement par la suite, car en l’état, c’est une petite Princesse pourrie gâtée. Quand je citais la Révolution française, Mia la réinterprète sans équivoque : « S’ils n’ont pas de pain, qu’ils mangent de la viande ! » en référence à « S’ils n’ont pas de pain, qu’ils mangent de la brioche ! » de Marie-Antoinette qui a fini décapitée elle aussi.

     Je n’ai pas compris toute cette analogie autour de la lune, à croire que la France est toujours un pays fantasmé de conte de fées… Ainsi, l’Empire se nomme Tearmoon. L’héroïne Mia Luna Tearmoon. Il y a des références à la lune absolument partout. Et, sans discerner de fantasy à proprement parler, c’est troublant.

     Le Japon imagine la France comme un pays romantique, sans réaliser que le Paris des années 20 n’existe plus depuis fort longtemps… Il existe bien des reliquats de cette vieille époque, mais si peu… En revanche, la Révolution française pourrait bien éclater de nouveau à l’heure d’aujourd’hui…

     Pour ce qui est du romantisme, la France est le berceau de l’amour courtois au Moyen-Âge. Et de nombreux courants artistiques ont suivi à travers les époques en se basant sur l’amour courtois comme point de départ (valeurs chrétiennes et chevaleresques). Même si c’est à la fin du XVIIIème siècle qu’il s’ancre avec une définition bien spécifique : ressentir des émotions intensément. Ainsi, la mélancolie est romantique. Il y a eu un glissement sémantique par la suite, hélas, définissant une personne romantique de « fleur bleue ».

     Le narrateur parle de Mia alors qu’elle-même pense en même temps dans la case d’à-côté, ce qui casse l’immersion. Ça donne l’impression de se pencher sur le manga que lit quelqu’un, qu’il ponctue à voix haute en donnant ses impressions durant la lecture. C’est vraiment dommage.

     L’histoire se laisse suivre, mais prend son temps. De fait, je ne peux étayer davantage ma chronique, n’ayant lu que le Volume 1. En termes de péripéties, on sent qu’elles émergent à peine et que le gros du scénario se situe après. Quoi de plus logique, puisqu’on commence l’histoire alors que Mia n’a que 12 ans ?

     Concernant Mia, je n’ai pas du tout apprécié son personnage, donc je n’ai pas d’affect particulier. Espérons qu’elle se bonifie par la suite, car pour l’instant, elle est exécrable…