Noob : Les Sans-Factions est l’adaptation de la websérie éponyme, ayant connue son heure de gloire dans les années 2010.

Pour tout trentenaire ventripotent ayant connu les heures de gloire de la chaîne Nolife, Noob est une institution. Tournée avec les moyens du bord par une équipe réduite dans le Var, la websérie a rapidement acquis un statut culte auprès des geeks de la vieille époque, au même titre que Le Visiteur du Futur ou encore La Flander’s Company.

Oui, durant les années 2000, nos petits Geeks avaient du talent. Et si vous êtes trop jeune pour avoir connu les séries que je viens de citer, vous êtes indubitablement passé à côté d’un phénomène du web comme il n’en existe plus aujourd’hui.

Sur un ton plus personnel, Noob est pour moi un doudou nostalgique d’une époque plus simple, où je suivais avec attention ce genre de productions. Et je me souviens qu’alors, l’équipe avait pour projet de lancer son RPG. En 2017, elle a réalisé un financement participatif impressionnant à cette fin.

Le projet du « jeu vidéo Noob » voit enfin le jour sous une forme plus consensuelle grâce à Microids, ainsi qu’à un financement participatif ayant récolté pas moins de 1 246 153€.

Un million d’euros pour un jeu vidéo ? Oui, c’est peu. Très peu. Mais, comme pour la websérie, le talent ne se compte pas en euros.

Editeur(s)
Microids
Sortie France
29 Juin 2023
PEGI
+7 ans
Liens Site Officiel
Support de test Xbox Series

Les PGM de l’eSport sont des Noobs

Noob : Les Sans-Factions vous présente deux amis, Martin et Adam. Tous deux joueurs passionnés d’un MOBA que l’on comprend être League Of Legends ; ils se retrouvent dans un cybercafé pour échanger sur leur titre favori.

C’est alors qu’ils entendent parler du MMO Horizon et, plus précisément, de sa version 5.0 qui sortira sous peu, introduisant une grosse composante eSport.

Titillés dans leur instinct de PGM, ils décident de s’y mettre et de rusher le niveau 100 afin d’être prêts pour le grand jour. Problème : ce sont des gros noobs du MMO. Martin n’y comprend rien, ne connaît pas les termes inhérents au genre, et doit de fait tout apprendre depuis zéro.

En chemin, ils vont faire la connaissance de May et de Logs, deux autres joueurs qui viendront les aider à progresser.

Première question : À qui s’adresse le titre ? Visiblement, nul ne semble se l’être posée au sein des équipes avant le lancement du projet.

Car les fans de la websérie savent très bien ce qu’est un MMO, un PNJ, ou encore un familier. Certes, ces explications à destination des nouveaux venus (et, a fortiori, à ceux qui n’ont jamais touché au moindre jeu vidéo de toute leur existence) sont introduites de manière diégétique par les lacunes de Martin… Mais la cohérence, elle, en prend un sacré coup.

Noob : Les Sans-Factions aimerait s’adresser à un public plus jeune et inexpérimenté. Comme nous allons le voir plus tard, c’est une réussite sur bien des plans. Mais quid des trentenaires fans de la première heure ? Il est parfois assez ardu de garder le fil quand le jeu vous explique des points aussi simples et basiques… et incompréhensibles lorsque Martin, pourtant PGM de MOBA, ne sait même pas ce qu’est un PNJ ; comme s’il avait passé toute son existence enfermé dans un seul et unique titre dont il n’est jamais sorti…

Oui, non. En fait c’est logique. Un joueur de LOL moyen en somme.

Bref, revenons à notre intrigue.

Le jeu ne suit pas les pérégrinations de l’équipe d’origine de la série. Et c’est une très bonne chose. En prenant une direction nouvelle, Noob : Les Sans-Factions évite tous les pièges inhérents aux adaptations malhabiles usuelles.

Nouvelle intrigue, nouveaux personnages, nouvelle version. Tout est mis en place pour justifier les libertés prises par le jeu sans jamais nuire à la cohérence de l’univers.

Tout au long de l’aventure, vous allez donc suivre vos protagonistes qui, c’est un heureux hasard, vivent tous à Toulon. Quelle chance. Et c’est également à Toulon que sont installés le siège social de l’éditeur du MMO, les Q.G. IRL des principales guildes, ainsi que TOUS les joueurs que vous aurez l’occasion de rencontrer.

QUELLE. HEUREUSE. COÏNCIDENCE.

Outre ce point de détail qui prête plus à sourire qu’autre chose, vous allez régulièrement osciller entre vos phases ingame, où vous suivrez les pérégrinations de vos avatars virtuels ; et des moments dans le monde réel, dans lequel les personnages vont se rencontrer et en apprendre plus sur le lore, les joueurs, etc.

La première fois, j’ai été pris d’un malaise. Étrange réminiscence d’une autre série qui tente de faire osciller le joueur entre deux mondes et qui se prend systématiquement les pieds dans le tapis.

Par chance, ici on est bien loin de la catastrophe Assassin’s Creed. Les phases en « monde réel » suscitent généralement de franches barres de rires, des hommages très peu discrets (mais diablement efficaces), et mettent en exergue des points précis du scénario.

L’exploration y demeure solide et agréable, d’autant que la cohérence scénaristique fait qu’il n’y a aucun objet lootable ni point de sauvegarde durant ces moments.

Point d’honneur également pour l’agencement des maisons, qui reflète parfaitement la personnalité des différents protagonistes de la saga (par exemple Morgan Lavande qui a une collection de produits Fantöm).

Car oui, ces phases sont aussi et surtout l’occasion de rencontrer les « acteurs » de la série, mais aussi les équipes de développement, des studios français, etc.

Des clins d’œil à foison qui font sourire, même si on aurait aimé avoir des avatars dessinés des membres de la Flander’s, voire des scènes bonus type « entretien d’embauche d’Hippolyte ».

Concernant les phases au sein du MMO, soit le cœur du jeu, vous allez régulièrement tomber sur les personnages de la série. Tous ont droit à leur petit moment de gloire collant parfaitement avec leur archétype. C’est un réel plaisir, à la limite du fangasme.

Pourtant, Noob : Les Sans-Factions parvient à ne jamais oublier qui il est, ni qui sont ses héros. Votre équipe crée sa propre guilde, évolue dans un Horizon dans lequel les protagonistes de la série ont déjà atteint le niveau maximum ; et de fait, sa propre histoire n’est jamais vampirisée par ces derniers. Ce sont eux les héros, et votre histoire est bel et bien originale (et bigrement plaisante à suivre).

Faire beaucoup avec peu de moyens

Noob : Les Sans-Factions a un problème majeur : son manque de moyens. Dès le début, le style graphique vous ramène droit à une époque oubliée du jeu vidéo. C’est une capsule temporelle vers l’année 2013 et la sortie de Pokémon X et Y.

Oui, graphiquement on en est là. 10 ans de retard, pour une patte visuelle qui n’est pas sans rappeler la 6ème génération de la plus célèbre licence de capture de monstres. Que ce soit au niveau du chara design ou des environnements, tout fleure bon la 3DS.

Et pourtant… Assez étrangement, ce côté nostalgique dans la direction artistique colle parfaitement avec un jeu estampillé « Noob », au point qu’on aurait bien du mal à imaginer autre chose.

Loin d’être laid, le jeu est aussi daté que la série dont il est issu ; et de fait, parfaitement cohérent avec son propos.

Par contre, les cinématiques et les dessins sont, eux, de toute beauté. On regrettera peut-être que les illustrations ne collent pas avec le style vestimentaire (ni même avec les coupes de cheveux ou les couleurs) des protagonistes, ou encore que ces dernières manquent de diversité mettant en avant leurs émotions. Mais c’est là du pinaillage tant la qualité est au rendez-vous.

Concernant les cinématiques, d’ailleurs ; ces dernières font office de point d’orgue concernant l’intrigue du MMO. Peu nombreuses, elles sont d’une qualité irréprochable et bénéficient de plus de l’excellence du comédien de doublage Pierre-Alain de Garrigues (PADG pour les intimes) qui leur donne vie.

D’une sobriété folle, Noob : Les Sans-Factions ne perd jamais de temps dans les détails ; et c’est là peut-être une nouvelle fois un point à mettre à son discrédit. Les bruitages sont minimalistes, l’ambiance sonore totalement en décalage avec l’action, les menus un enfer à parcourir… Rien ne va !

Mais bon Dieu que c’est drôle et cohérent avec la série…

Juger un jeu estampillé Noob à l’aune des canons modernes serait une hérésie pure et simple, tant la série a justement connu son succès grâce à ce côté « artisanal » de la production, aux acteurs… disons amateurs, aux PNG mal découpés faisant office de décors, etc.

Et ce côté fait par-dessus la jambe, mais avec amour, vous le retrouvez dans chaque fibre du jeu. Avec ce regard, c’est une réussite totale. Sans connaître la série, je pense que les ignorants passeront leur chemin en se disant que le jeu est un échec cuisant.

Un gameplay nostalgique

Comment parler d’un RPG sans évoquer son gameplay ? Ici, les combats sont au tour par tour. Du grand classique, mais dans un style purement rétro, pour ne pas dire vintage.

Comme pour le reste, l’affichage y est minimaliste et sans fioritures. Vous y trouvez les informations succinctement affichées sans une once de mise en forme. Pis encore, c’est à vous et à vous seul de comprendre comment tout cela fonctionne.

Par chance, c’est simple… sinon pour les altérations d’état qui auraient, a minima, dû bénéficier d’une entrée dans le codex.

Mais de toute manière, quel que soit le niveau de difficulté choisi au lancement de la partie, un constat s’impose : Noob : Les Sans-Factions est simple. Beaucoup trop simple.

Une fois vos quatre Gros Bill recrutés, la grande majorité des combats ne dure pas plus d’un seul tour. Vous roulez littéralement sur le jeu en spammant les attaques de zone.

Seuls les combats de boss sont un poil plus complexe et nécessitent, dans de très rares moments, d’utiliser une potion de vie ou de mana.

Pourtant… Comme pour le reste, en dépit de ces problèmes, sans nul doute rédhibitoires pour certains ; une belle profondeur se développe comme rarement dans ce genre de productions.

Chacun de vos personnages dispose en effet d’une classe, elle-même subdivisée en trois archétypes. Par exemple, votre élémentaliste pourra choisir de se spécialiser dans les soins, les dégâts sur la durée, les buffs ou le DPS. Idem pour votre barbare, qui est libre d’endosser le rôle de tank ou non.

Cette liberté conférée par le jeu est réellement impressionnante, d’autant que les compétences utilisables en combat dépendent non seulement de l’évolution de vos personnages, mais également de leur équipement.

Enfin, ces archétypes débloquent des arbres très complets permettant, une fois encore, de mieux spécialiser vos héros, pour en faire des monstres de guerre inarrêtables.

Un gameplay nostalgique

Malgré le budget minimaliste, les développeurs ont eu à cœur de proposer l’expérience la plus complète possible, mais surtout la plus cohérente et respectueuse de son matériau de base.

Si tout fait cheap, sans moyens, vieillot et en décalage avec le marché moderne ; force est de constater que pour autant, on ne s’ennuie jamais dans Noob : Les Sans-Factions.

Tous les canons du MMO sont respectés à la lettre : que ce soit les PNJs et leurs quêtes stupides (allez voir tel personnage, qui se trouve littéralement à côté de l’autre), les factions ; tout est mis en place pour immerger le joueur au maximum.

Vos différents héros apprendront ainsi chacun deux métiers, qui vous seront utiles (ou non) dans votre aventure. Libre à vous de miner, pêcher, récolter des plantes ou… collectionner des monstres.

Petite pause sur ce dernier point : Les smourbiffs sont aussi laids que dans la série. Je ne saurais que trop vous conseiller d’en choisir un comme familier et de regarder son JPG animé sur deux frames se déplacer lamentablement derrière vous. C’est absolument parfait.

Incroyablement plaisant, le jeu est de plus écrit avec grand talent. L’humour y est omniprésent, de même que les références à la websérie, à l’univers du web en général ; mais aussi à d’autres jeux qui peuvent parfois se prendre de jolis tacles bien placés.

Un plaisir dans chaque conversation, si vous avez ne serait-ce qu’une once d’humour.

Mention spéciale d’ailleurs pour Forpitas, la ville des streamers où toutes vos stars de Twitch favorites (sauf Misha et moi) sont présentes… Et dans laquelle l’intégralité des gardes a la même ligne de dialogue.

Une fois totalement immergé dans le jeu et son humour décalé, on en vient même (et c’est sans doute son seul point négatif) à regretter que les développeurs n’aient pas été jusqu’au bout de leurs choix.

Oui, je voulais le PNG moche de la saison 1 de la Tour de Galamadriabuyak en temps de chargement !

Concernant cette dernière justement, il est bon d’ajouter que oui, elle aussi est bien présente. Les amateurs comprendront où je veux en venir : le leveling est bloqué par paliers. Ainsi, une fois au niveau 10 vous devrez attendre que le scénario vous amène vers la Tour pour débloquer les niveaux suivants, jusqu’à 20. Puis rebelote.

Mécanique intéressante, les développeurs ont décidé malgré tout de récompenser les joueurs en offrant, lorsque vous dépassez la limite, des objets ou points de talent à chaque niveau supplémentaire.

J’aime

L

Le côté rétro

L

Le respect total de la websérie

L

Un humour omniprésent

L

Une écriture excellente

L

Un doudou nostalgique

L

Un style graphique très vintage

J’aime moins

K

Y’a pas le PNG moche de la tour de Galamadriabuyak