Raid on Taihoku est le tout premier jeu du studio taïwanais Mizoriot Creative. Une aventure singulière, mature et clairement à ne pas mettre entre toutes les mains.

Découverte d’un « jeu » qui n’en porte que le nom.

Editeur(s)
Softstar
Sortie France
21 sept. 2023
PEGI
+3 ans
Liens Site Officiel
Support de test Nintendo Switch

Le Raid sur Taihoku

Raid on Taihoku est un jeu qui porte étonnamment bien son nom, puisque son intrigue se déroule durant le fameux raid sur la ville de Taihoku (située à Taïwan) par les Alliés à la fin de la Seconde Guerre mondiale, le 31 mai 1945.

Historiquement, ce massacre (il n’y a pas d’autre manière de le décrire) fit plus de 3 000 morts et des dizaines de milliers de blessés dans la cité qui est aujourd’hui connue sous le nom de Taipei.

Au total, les forces américaines envoyèrent 117 bombardiers lourds et larguèrent quelques 3 800 bombes lors d’une attaque dévastatrice qui dura plus de 3 heures consécutives. Laissée totalement sans défense par l’occupant japonais, la ville subit des dégâts majeurs et eut du mal à s’en remettre ; au point que certains bâtiments ne furent restaurés que dans les années 90.

Pourquoi insister autant sur le contexte historique ? Eh bien, pour deux raisons. La première, c’est que Raid on Taihoku promet une expérience « basée sur des faits réels » et situe son action durant les bombardements, soit le 31 mai 1945.

Le second point tient plus du sous-texte, des raisons qui ont poussé les développeurs à produire ce titre. En effet, durant de très nombreuses années, ce raid aérien allié a été totalement passé sous silence, y compris dans les écoles taïwanaises. Aujourd’hui, nombreux sont les habitants de Taipei à ne pas être au courant de ce moment charnière de l’histoire de l’île, ou à croire que ledit bombardement était d’origine japonaise.

Une remise en contexte de la part de Mizoriot Creative qui est à la fois didactique et éducative, afin de permettre au plus grand nombre de découvrir un événement terrible et malheureusement oublié de l’histoire.

Dans Raid on Taihoku, vous incarnez Kiyoko. La jeune fille vient de perdre ses parents lors du bombardement et se réveille dans un camp de réfugiés sans le moindre souvenir, sinon un nom : « Makoto ».

Perdue et troublée, elle ne parvient pas même à se remémorer le visage de ses parents et ne peut faire son deuil, ces derniers ayant été brûlés dans une fosse commune pour éviter la propagation des maladies.

Kiyoko va donc parcourir les ruines de la ville afin de retrouver son passé et son identité, chercher à comprendre pourquoi la ville a été bombardée ; mais également comprendre qui est cette fameuse « Makoto ».

Raid on Taihoku… est un jeu particulièrement dur. Non pas en termes de difficulté (je reviendrai sur le gameplay ultérieurement), mais surtout via l’histoire qui vous est ici racontée. Au gré de son périple, Kiyoko va endurer les bombardements, découvrir les horreurs de la guerre et l’inhumanité enlaçant le cœur des hommes durant les périodes les plus difficiles.

Marquant au possible, Raid on Taihoku tient plus du devoir de mémoire que du jeu vidéo et peut aisément être comparé à l’exceptionnel « This War Of Mine », mais dans un contexte historique bien réel totalement assumé.

Le fait que le titre vous martèle à plusieurs moments que les événements ici narrés sont documentés induit une implication supplémentaire de la part du joueur, qui se retrouve bien souvent démuni devant l’horreur des situations dépeintes. La fiction de « l’aventure » de Kiyoko est régulièrement mise au second plan afin de dévoiler des pans entiers de ces quelques heures insoutenables. Orphelinat détruit, église abritant des civils bombardée, charniers de corps horriblement mutilés…

Tortures, suicides, exécutions, lynchages… le jeu ne vous épargne jamais et adopte une approche traumatisante de la guerre, sans pour autant ne rien montrer distinctement.

À de (nombreuses) reprises, le titre fait écho au « Tombeau des Lucioles », tant dans ce que ressent le joueur que dans le traitement de l’histoire de fond.

On regrettera seulement un titre uniquement disponible en anglais et des textes pouvant par moments défiler très vite, rendant difficilement compréhensible certains points pourtant clés de l’intrigue.

Parlons quand même du jeu…

Raid on Taihoku reste malgré tout une production vidéoludique. Mettons donc de côté son intrigue pour se concentrer sur ses qualités (et défauts) en tant que divertissement.

Le titre vous propose d’incarner Kiyoko durant son périple. Construit sur une structure très classique, le titre va vous faire alterner entre des zones « sûres » (tout est relatif) et des moments de tensions.

Découpées sous forme de niveaux, ces dernières sont filmées du dessus. La jeune fille est bien entendu sans défense, et va devoir se frayer un chemin entre les bombes, les soldats et autres décombres qui jonchent son chemin. Pour se défendre, elle ne dispose au départ que d’un vulgaire parapluie rouge, fort de nombreuses symboliques. Par la suite, elle va trouver d’autres « outils » qui vont l’assister dans sa progression.

Dans sa quête, Kiyoko est accompagnée par un chien capable de l’aider à passer certains obstacles. L’idée particulièrement intéressante du titre vient de cette complicité : durant une grande partie de « l’aventure », vous allez diriger les deux protagonistes en même temps : Kiyoko à l’aide du stick gauche, et le toutou avec le droit. Un autre bouton vous permet de déployer votre parapluie pour vous protéger des débris.

Particulièrement court, Raid on Taihoku ne vous fait jamais sombrer dans une quelconque forme de lassitude malgré des niveaux relativement redondants. Tout au contraire, le jeu prend suffisamment aux tripes pour vous donner l’envie de poursuivre.

Dans les zones dites « sécurisées » (vraiment… changez de nom), vous dirigez uniquement la jeune fille et pouvez découvrir divers objets et monuments cachés, tout en faisant progresser l’intrigue. Ici, point de boost ni d’aides, uniquement des « morceaux d’histoire » vous permettant à la fois d’en apprendre plus sur les événements et de développer le scnénario de Kiyoko.

Graphiquement, Raid on Taihoku s’en tire vraiment avec les honneurs. Son moteur, parfaitement adapté à la Nintendo Switch, n’est certes pas au niveau d’autres productions (surtout dans ses modèles 3D) ; mais convient parfaitement à la narration. Par contre, toutes les illustrations sont d’une richesse sans défaut, capable de restranscrir toutes les émotions des protagonistes à la perfection.

J’aime

L

Une histoire très forte...

L

Très belle direction artistique

L

Trois heures vraiment intenses

L

Des idées de gameplay originales

J’aime moins

K

...parfois même trop

K

Uniquement en anglais

K

Un moteur 3D qui pêche un peu