Premier titre du studio Turning Wheel, Barony se présente sous la forme d’un RPG Roguelite en vue FPS rendant hommage aux légendes du genre telles qu’Ultima: Underworld ou l’exceptionnel Arx Fatalis.

La spécificité du titre ? Proposer une expérience unique dans le genre, avec en plus la possibilité d’explorer les donjons en multijoueur jusqu’à 4.

Si le titre est certainement agréable sur PC, cette version pour Nintendo Switch (sortie le 1er août) s’avère… décevante.

Editeur(s)
Turning Wheel
Sortie France
1 août 2023
PEGI
+16 ans
Web Site officiel
Support de test Nintendo Switch

Des Donjons, mais pas de Dragons

Dans le monde de Barony, les humains ont été réduits en esclavage par un vil baron souhaitant construire un immense donjon souterrain. Vivants comme des rats sous terre, les hommes se sont résignés à leur sort et travaillent jusqu’à l’épuisement sous la menace constante des sbires monstrueux de leur tortionnaire.

Vous avez décidé de prendre les armes et d’en finir une fois pour toutes, de libérer les vôtres du joug de cet être malfaisant. Mais vous n’êtes rien d’autre qu’un vulgaire esclave, qui ne sait ni manier les armes ni ne dispose du courage nécessaire pour défaire seul une armée entière.

Si les bases de l’intrigue de Barony sont intéressantes et rappelleront d’agréables souvenirs à certains d’entre vous (qui ne manqueront pas, comme moi, d’appeler leur héros « Am Shagar ») ; elles demeurent malheureusement bien faibles et ne proposent jamais une narration à la hauteur des attentes des amateurs de RPG.

Ne vous attendez ni à une narration particulièrement profonde, ni même à un quelconque développement scénaristique. Les PNJs se comptent sur les doigts d’une main et sont tous des « personnages fonctions ». Entendez par là qu’ils ont un rôle à remplir et que l’intégralité de leurs rares lignes de dialogues est dirigée en ce sens.

Certes, des parchemins et autres livres peuvent être découverts au gré de vos pérégrinations au cœur des donjons, mais sans jamais apporter cette profondeur de lore si caractéristique des titres dont il prétend pourtant être l’héritier.

De plus, le titre ne propose aucune localisation en français, des textes relativement petits et pixélisés. La migraine ophtalmique n’est guère loin pour quiconque aurait l’outrecuidance de vouloir se plonger un peu trop dans l’aventure…

Des bases solides, mais une exécution ratée

Conscient de sa complexité, Barony vous propose dès le lancement de suivre un interminable didacticiel afin d’en maîtriser tous les arcanes. Présenté sous forme de défis vous demandant de terminer des donjons, ces derniers sont plutôt bien amenés par une présentation diégétique… mais qui n’hésite pourtant pas à briser régulièrement le quatrième mur.

Concrètement, vous allez devoir enchaîner un nombre considérable de niveaux afin d’apprendre TOUTES les bases du titre : vous déplacer, actionner des objets, utiliser des sorts, arcs ou armes de corps à corps. Particulièrement longs et indigestes, ces donjons représentent un véritable défi tant l’ennui et la difficulté y sont prégnants… parfois pour vous présenter des mécaniques qui pourtant coulent sous le sens.

Le pire étant que la présence de ces fameux apprentissages est contre-productive, puisqu’ils entachent gravement l’un des principaux intérêts des Donjons Crawler de ce type ; à savoir la découverte par l’expérimentation.

Ce qui fait le sel d’un Arx Fatalis ou d’un Ultima: Underworld est justement totalement absent de Barony. Le jeu veut vous tenir par la main, vous enseigner jusqu’à la moindre de ses mécaniques, comme pour vous hurler aux oreilles « hey, regarde ! J’ai bien appris mes leçons ! ».

Pour ceux qui n’auraient pas eu la chance de découvrir ces titres, je vais étayer mon propos par l’exemple : dans Arx Fatalis, rien ne vous indique qu’il est possible de faire cuire de la viande en la jetant dans un feu de camp. Ce n’est que par l’expérience que vous découvrez cette mécanique. Ce faisant, vous vous prenez l’envie d’essayer d’autres choses, découvrant au fur et à mesure tout ce que le jeu permet. Oui, un peu comme dans Zelda: Breath of the Wild… mais 20 ans plus tôt.

Barony, lui, va simplement vous indiquer cette fonctionnalité par un message à l’issue d’un didacticiel. Certes optionnel, cette introduction vous est fortement recommandée par le jeu… et malheureusement nécessaire, tant ce dernier est difficile. Car, c’est la première chose à savoir sur Barony : ce dernier se qualifie lui-même de « hardcore ».

La Darksoulisation de trop

La difficulté est-elle une fin en soi ? C’est la question à laquelle vous êtes légitimement en droit de vous poser en ces temps si singuliers. Depuis la sortie (et le succès) de la série Dark Souls ; nombreux sont les jeux à vouloir tenter de proposer une formule peu ou prou similaire, sans comprendre ce qui fait le charme de ces derniers.

Et Barony ne fait pas exception à la règle. Vouloir proposer une difficulté élevée, c’est bien… la rendre juste et amusante, c’est mieux.

Car lorsque vous allez mourir en boucle au sein du didacticiel censé vous apprendre les bases du jeu, vous vous ferez sans aucun doute la même réflexion.

À trop vouloir proposer un « challenge », Barony en oublie le principe même d’un jeu-vidéo : être ludique.

Certes, c’est pile le genre de propos qu’une partie de la presse et des joueurs ont opposés à la série phare de From Software. En quoi Barony est-il différent ?

Pour vulgariser, le présent titre ne propose aucune option de maîtrise de son avatar numérique ; mais plus des « moyens de survivre ». La maniabilité, proche de la catastrophe industrielle, ne permet aucune esquive. L’I.A. est programmée pour attaquer le joueur à vue, enchaînant sans fin des attaques rapides sans la moindre fenêtre de contre-attaque.

Certes votre héros peut s’équiper d’un bouclier, mais ce dernier ne dispose d’aucune possibilité de parade. Son utilisation se résume à réduire le nombre de dégâts que vous recevez, non à préparer une stratégie viable.

Joueur au corps à corps est donc particulièrement ardu, d’autant que l’intégralité des ennemis présent dans le jeu (y compris de simples rats) est capable de venir à bout du joueur sans le moindre petit effort.

Monter de niveau est une obligation en début de partie, afin de débloquer quelques compétences secondaires nécessaires… mais pour ce faire, vous devez vous battre. Et donc risquer la mort.

Le titre de Turning Wheel se montre souvent particulièrement injuste et inéquitable, la confrontation directe avec deux ennemis synonyme de mort immédiate.

Il reste cependant de jouer une classe à distance, telle que mage ou archer… mais là encore, leur potentiel de survie est proche du néant. Au moindre coup, un jeteur de sort finit six pieds sous terre. Les flèches de l’archer sont limitées en nombre, et particulièrement difficiles à trouver. Enfin, le level-design en couloirs labyrinthiques est conçu pour bloquer toute velléité d’attaque à distance…

La fuite est donc, dans les premiers niveaux, votre meilleur allié. Quitte à passer à côté de l’essentiel du « fun », si ce jeu en dispose…

Parlons désormais de la principale spécificité du titre, à savoir son aspect roguelite coopératif.

Eh bien là encore, vous êtes face à une petite déception. Barony ne propose aucune réellement mécanique propre au genre précité, sinon une disposition des donjons générés aléatoirement à chaque nouvelle mort.

Lorsque votre héros périt, il est automatiquement remplacé par un autre de classe similaire… mais revenu au niveau 1 et sans le moindre équipement. Il ne vous reste alors plus qu’à tout refaire, afin d’espérer progresser un poil plus loin.

Eu égard de la difficulté outrageuse du titre, c’est un comble que ce dernier ne propose aucun système pour vous simplifier la vie sur le long terme. Ici, la mort ne représente pas un pallier à franchir en s’améliorant, mais bel et bien un frein brutal et inique à votre progression.

Le côté multijoueur est sans doute le seul aspect à pouvoir le sauver du naufrage absolu. La difficulté n’étant pas basée sur le nombre de joueurs actifs, le jeu devient finalement agréable lorsque vous le parcourez en compagnie de vos amis.

Visiblement pensé pour être joué ainsi, il pêche cependant par sa volonté de proposer un mode « solo » totalement injouable.

Un portage totalement raté

C’est sans doute la question que tout développeur indépendant doit se poser lorsqu’arrive le moment d’adapter un jeu conçu et pensé pour le PC à une console de salon : comment faire entrer autant de commandes et de raccourcis sur quelques boutons ?

Certains s’en sortent avec les honneurs, réimaginant totalement le gameplay en proposant une approche totalement différente de l’expérience d’origine. Et d’autres font n’importe quoi. Devinez dans quelle catégorie se situe Barony ?

Comment justifier une telle maniabilité, sinon via le prisme d’une incompétence notoire ? Les développeurs semblent ne pas même avoir pris le temps de tester leur production avant de la vendre et le résultat n’étonnera personne : il est catastrophique.

Les bases sont (heureusement) respectées : vous vous déplacez avec le stick analogique gauche, le droit sert quant à lui à gérer la caméra. Pour une raison totalement obscure, les interactions avec les éléments se font avec RB, les attaques avec les gâchettes LT et RT… comme dans un FPS classique, en somme.

Quid de A, B, X et Y ? Eh bien ces derniers servent… à actionner des raccourcis d’objets. En maintenant l’une de ces touches enfoncée, vous allez ouvrir un sous-menu et sélectionner votre objet ou sortilège disposé dans l’un des trois emplacements.

Extrêmement lourde, ce mappage ne met d’ailleurs pas le jeu en pause (ni ne le ralentit, d’ailleurs). Il faut donc être particulièrement vif pour… mourir le temps de sélectionner la bonne action tandis que les ennemis vous matraquent de toute part.

Des qualités malgré tout ?

Bien qu’il soit particulièrement difficile de conseiller Barony, il faut tout de même lui reconnaître bon nombre d’idées particulièrement intéressantes. N’usurpant pas son titre auto-proclamé d’héritier des Donjons Crawler historiques, le titre propose bon nombre de possibilités assez sympathiques à découvrir.

Chaque donjon propose également un biome différent, ainsi qu’un level-design labyrinthique agréable à parcourir. Dans sa globalité d’ailleurs, l’exploration est plutôt plaisante… nonobstant les hordes de monstres bien trop puissants qui hantent les corridors.

Enfin, il faut reconnaître au jeu un pixel art de qualité et bien agréable à regarder ainsi qu’une multitude de classes disponibles.

J’aime

L

Un Donjon RPG vaste

L

Des classes de personnages nombreuses et différentes

L

Un pixel art plutôt joli

L

Une exploration intéressante

J’aime moins

K

Un scénario post-it

K

Un didacticiel interminable

K

Une maniabilité infernale

K

Beaucoup trop difficile en solitaire

K

Uniquement en anglais

K

Textes trop petits

K

Des PNJ fonctions

K

Un côté Roguelite trop faible