Il aura fallu pratiquement huit ans aux développeurs français de Cyanide pour livrer la suite d’un des jeux de niche les plus fameux de tous les temps : Blood Bowl 3.
Si le premier Blood Bowl a su apporter en son temps un vent de fraîcheur aux jeux issus de la licence Warhammer, Blood Bowl 2 a trouvé son public. De simples amateurs devenus fans et, pour qui, le sport le plus sanglant de l’univers fantastique de Games Workshop est devenu une véritable institution.
Le troisième opus est enfin là, disponible d’entrée sur tous les supports possibles. Parviendra-t-il l’exploit de rassembler les foules autour de son concept et d’enfin propulser la licence au-devant de la scène eSport ? Vu les qualités indéniables de ce dernier, je l’espère sincèrement.
C’est dans les vieilles peaux vertes…
Blood Bowl 3 est un jeu de sport et de stratégie adapté du célèbre jeu de figurine Warhammer. Tout comme ses prédécesseurs, il se base sur la dernière version dudit tabletop en ce qui concerne ses règles, équipes et aménagements de jeux.
Que les amateurs se rassurent : ils ne seront guère perdus à l’achat de ce nouvel opus. Que ce soit en termes de mécaniques, de gameplay ou d’esprit ; ,tout est scrupuleusement respecté. On est bel et bien face à une suite qui ne cherche à aucun moment à révolutionner sa formule déjà bien éprouvée, ni même à apporter quelques changements drastiques à la licence ; mais uniquement des évolutions bienvenues qui décuplent le plaisir de jeu.
Le titre débute par un tutoriel (passable pour les habitués). Mais pour les nouveaux, les néophytes, les rookies désireux de décrocher un jour le très prisé titre de Gros Bras ; c’est un passage obligatoire.
Si vous pouviez déjà retrouver ce didacticiel dans les opus précédents, force est de constater que ce dernier manquait clairement de profondeur et que l’apprentissage se faisait dans la sueur et les larmes.
Tout ceci appartient désormais au passé, puisque via quelques mises en situation rapides, Blood Bowl 3 apporte les clefs de la victoire. Vous y apprenez le placement des unités, les différents rôles ; mais aussi comment tacler, bloquer, marquer un touchdown… Ou massacrer à cinq un adversaire sans défense tombé à terre. En somme, la base de tout bon match de Blood Bowl.
Après cela, libre à vous de vous jeter à corps perdu dans le multi en ligne, ou de vous heurter au mode campagne.
Ce dernier se découpe en ligue, vous permettant d’en apprendre plus sur les spécificités des différentes équipes via des matchs intenses et qui ne laissent aucun répit. La grande force du mode campagne apparaît rapidement : les développeurs ont eu la présence d’esprit de vous permettre d’affronter toutes les formations présentes en jeu. Vous comprendrez rapidement quelles sont les forces et faiblesses des différentes équipes, mais aussi comment utiliser certaines tactiques et stratégies pas forcément évidentes pour les nouveaux.
Contrairement à celui du second épisode, le mode campagne de Blood Bowl 3 ne cherche pas à vous imposer un scénario ni une quelconque équipe. C’est à vous de fonder la vôtre, puis de l’inscrire en ligue. Vous pouvez donc directement profiter des événements avec vos joueurs, les faire évoluer et apprendre à les aimer (ou pas) avant de les lancer dans la cour des grands. Une excellente idée, bien que l’absence de réel scénario soit dommageable. Le sentiment de perdre un élément majeur du second opus demeure, bien que l’on s’en remette rapidement puisque là n’est pas le cœur du jeu. Juste une mise en bouche.
Pour autant, vous serez agréablement surpris par la qualité des cinématiques de présentation de chaque ligue, de même que la présence des “joueurs stars” ou la similitude entre ces matchs et la compétition plus authentique. Malheureusement, le doublage français si bon à l’époque n’est plus d’actualité, ce qui empêche de pleinement profiter des commentaires très drôles des présentateurs.
L’un des points clairement négatifs vient sans doute de l’I.A. Si cette dernière est certes de bonne facture (les joueurs adverses n’hésitent jamais à mettre en place des stratégies, à tabasser votre équipe sans vergogne et cherchent clairement à gagner sans faire montre de la moindre pitié) ; il n’est pas rare que l’ordinateur prenne un temps considérable avant d’effectuer la moindre petite action. En résultent des matchs qui s’éternisent inutilement.
Si, lors des premiers matchs, on pense que c’est une décision volontaire afin de faire artificiellement baisser la jauge de “temps supplémentaire” des adversaires et ainsi simplifier le match… très rapidement, on réalise que ce n’est pas du tout le cas.
Vous finirez donc indubitablement par rager devant ces lenteurs… et en venir à tenter de réduire les effectifs de vos adversaires afin d’accélérer le match.
Relativement court, ce mode campagne est clairement là pour vous faire patienter et vous apprendre les rudiments du jeu tout en vous permettant de gagner de précieux points PSP, nécessaires à l’amélioration de vos joueurs.
Les matchs libres (contre l’I.A. ou un ami) sont bien entendu de retour, de même que les compétitions en ligne.
Résolument eSport
Blood Bowl 3 ne fait pas de chichi et ne cherche pas à vous entourlouper : c’est un jeu compétitif fait et pensé pour être joué en ligne.
À cette fin, il a tout de même pour lui de proposer à la fois des matchs en ladder (de nouveau, non disponibles au lancement) et amicaux… Mais également de monter votre propre ligue en ligne. Une fonctionnalité communautaire vraiment bienvenue et qui pourrait bien être l’un des meilleurs atouts du titre. À vous le loisir d’organiser des tournois avec vos amis, voire pourquoi pas des ligues non officielles.
Mais un bon jeu eSport doit avant tout être équilibré. Et, très clairement, le titre brille sur ce point. Chaque équipe dispose de ses forces, faiblesses et d’une manière résolument différente d’envisager les matchs pour décrocher la victoire.
Au nombre de douze au lancement cependant, on déplore le manque cruel de la moitié du roster disponible à la fin du précédent opus. En comptant l’ajout d’une nouvelle équipe tous les trois mois, il faudra donc attendre 2026 pour disposer d’un contenu équivalent.
Est-ce un point négatif ? Si vous êtes un joueur féru de Blood Bowl 2 et que votre équipe n’est pas incluse dans celles déjà présentes, sans doute. Pour tous les autres, clairement non. Tout au contraire, cette idée permettra au titre de s’assurer un suivi et des nouveautés durant au moins 3 ans et, de fait, de relancer régulièrement l’intérêt du public.
De plus, il est important de rappeler qu’à son lancement, Blood Bowl 2 ne disposait que de 6 équipes, soit la moitié du roster actuel ! Le travail effectué sur chacune d’entre elles est réellement visible, rendant les parties d’autant plus palpitantes.
C’est MA team !
Si l’on pouvait bien reprocher une chose à Blood Bowl 2, c’était l’uniformisation de ses équipes. Les développeurs de chez Cyanide l’ont visiblement compris et ont décidé de corriger le tir, tout en s’assurant des revenus pour supporter le jeu sur la durée.
Concrètement, ici, chacun de vos joueurs est unique. Ils disposent d’un nom, de caractéristiques et de talents. Si les arbres d’évolution sont communs aux joueurs d’une même catégorie, vous avez la liberté de dépenser des PSP afin de débloquer de nouvelles compétences ou d’améliorer leurs statistiques.
Ces dernières sont relativement coûteuses, d’autant que les fameux PSP se débloquent uniquement en fonction de la performance de vos unités en match. Pour maintenir une équipe de même valeur, il faudra donc apprendre à jouer collectif et ne laisser personne sur le banc de touche.
De fait, et si après de (très) longues heures, il est possible d’avoir deux joueurs totalement identiques ; il faudra dans un premier temps penser à sa stratégie pour faire monter ses unités de manière synergique pour espérer garder le niveau de la compétition.
Sur le papier, les possibilités sont simplement dantesques, au point qu’il est extrêmement improbable de tomber sur des équipes similaires à haut niveau.
Vous et votre adversaire jouez tous deux les Orcs ? Qu’importe, votre stratégie se basera peut-être plus sur l’ultra offensif avec des blitzers capables de dégommer tout ce qui bouge, tandis que lui aura une équipe plus versatile, basée sur son Ogre ou sur ses gobelins.
À ce propos, l’ajout d’une nouvelle caractéristique de Passe est également une excellente idée, puisqu’il est tout à fait possible de transformer une équipe à la base très mauvaise sur le contrôle de balle et ainsi surprendre ses adversaires.
Les deux nouvelles équipes ajoutées au roster de base (Orcs Noirs et Noblesse Impériale) sont parfaitement dans cette optique, d’ailleurs. Si les premiers ont un nombre d’unités très restreint (seulement trois), ils disposent d’un coût de recrutement très bas pour les gobelins et d’une puissance brute colossale au détriment d’un jeu de balle déplorable. Les seconds sont en revanche bien plus mobiles, mais a contrario très fragiles sur le jeu défensif et avec un coût de recrutement très important.
On prend donc un réel plaisir à explorer les spécificités de chaque équipe et les parties s’enchaînent sans que l’ennui ne pointe jamais le bout de son nez.
Bien entendu, le corollaire négatif vient du fait qu’eu égard du temps colossal qu’il faut pour monter une équipe viable, la majorité des joueurs risque de se focaliser sur l’une d’entre elles plutôt que de prendre le risque de perdre un temps précieux en explorant toutes les possibilités offertes par le titre. Grave erreur, d’autant que jouer ces équipes vous permettra également d’en apprendre les forces et les faiblesses et, de fait, de mieux appréhender vos futurs matchs compétitifs.
Enfin, les joueurs peuvent être entièrement customisés via des équipements achetables dans la boutique du jeu. Un système de monnaie virtuelle est bel et bien de la partie, oui. Intitulée “Malepierre”, cette devise peut être gagnée en jeu via le Blood Pass ou avec votre carte bancaire.
Au moment où je rédige ce test, le premier Blood Pass n’est pas encore intégré au jeu, aussi est-il difficile d’estimer si ce dernier tire vers la mécanique prédatrice ou simplement le bonus sans conséquences. La seule information dont je dispose, c’est que les équipes seront ajoutées via ce dernier. Il faudra donc jouer et le compléter pour espérer les débloquer sans débourser le moindre centime.
Pour autant, aucun bonus n’est présent dans la boutique. Il ne s’agit que de cosmétiques utilisables pour rendre votre équipe réellement unique, mais sans vous donner le moindre avantage. On n’est donc clairement pas devant un pay-to-win.
Notez également que vous pouvez, gratuitement, changer les couleurs de vos joueurs, leurs noms ou encore votre emblème.
Bien entendu, on regrettera de ne plus avoir l’option de changer le visage de nos joueurs, bien qu’en jeu cette fonctionnalité était relativement innutile. Le point le plus dommageable venant sans doute du fait que les mutations ne soient plus visibles à l’écran.
Encore un poil de travail…
Malheureusement, je ne peux passer sous silence les lourds défauts de Blood Bowl 3. Le jeu est clairement sorti dans un état acceptable, mais souffre de quelques bugs assez gênants.
On notera notamment des problématiques de caméra, des formations qui ne se sauvegardent pas, des soucis de connexion au serveur, ou encore une lourdeur dans la maniabilité de ses joueurs à la manette… Ainsi qu’un manque clair d’informations relativement punissable (comme le fait qu’en supprimant un joueur, on perd définitivement l’intégralité de ses cosmétiques, pourtant achetés). L’éditeur fait savoir que ce point est un bug qui sera corrigé dans un patch ultérieur.
Bien entendu, Cyanide et NACON comptent voir le jeu tenir sur la durée, aussi n’ai-je pas le moindre doute que des patchs seront régulièrement disponibles afin de corriger ces différentes problématiques et rendre hommage au titre dans toute sa splendeur.
Points positifs
Incroyablement jouissif
Très complet
Fidèle au tabletop
Du contenu pour des années
Un système de progression gratifiant
Des joueurs totalement personnalisables
points négatifs
Quelques bugs assez gênants
Une I.A. qui prend (trop) son temps
Un nombre d’équipes limité qui frustrera les joueurs de Blood Bowl 2.
LES MUTATIONS NE SONT PLUS VISIBLES à L'écran
Conclusion : This is Blood Bowl !
Excellent dans sa réalisation et ses mécaniques de jeu, addictif au possible et résolument tourné vers la compétition en ligne ; Blood Bowl 3 dispose de toutes les cartes en main pour devenir un incontournable de la scène eSport dans les prochaines années.
Espérons simplement que le Blood Pass ne soit pas trop agressif, et que les quelques bugs soient rapidement corrigés afin de le montrer sous son meilleur jour.