Dans l’univers de Neptunia, les consoles ont un visage, les pixels une âme, et la quatrième paroi n’est jamais bien solide. Avec Megadimension Neptunia VIIR, Idea Factory revisite son RPG satirique dans une version retravaillée : nouveau moteur graphique, système de combat repensé, et surtout, intégration de la réalité virtuelle pour rapprocher les joueurs de leurs divinités numériques préférées.
Mais cette refonte, initialement pensée pour la PlayStation VR, parvient-elle à séduire sur PC sans perdre son charme décalé ? Entre nostalgie recyclée et nouveautés timides, la promesse d’une immersion divine tient-elle vraiment debout ?
Trois dimensions pour une guerre divine
Le scénario de Megadimension Neptunia VIIR reprend fidèlement la trame de Neptunia VII, en la découpant en trois arcs narratifs distincts : Zero Dimension Neptunia Z, Hyperdimension Neptunia G et Heart Dimension Neptunia H. Chaque segment explore une version alternative de Gamindustri, tour à tour en ruine, menacée ou corrompue. L’intrigue mêle les registres avec son ton désormais codifié : humour absurde, ruptures de ton, références méta, mais aussi des instants plus sombres où la série ose un semblant de gravité.
Au cœur du récit : Neptune, héroïne auto-proclamée et déesse de Planeptune, propulsée dans un monde effondré où elle rencontre Uzume Tennouboshi, nouvelle CPU marquée par une résilience tragique. Ce duo inattendu fonctionne à merveille, entre punchlines et confidences silencieuses. L’écriture ne réinvente rien, mais parvient à insuffler une dimension émotionnelle sincère, notamment dans les phases de désespoir croissant de la Zero Dimension.
Les autres déesses — Noire, Vert, Blanc — ainsi que leurs sœurs respectives, font leur retour dans des arcs parallèles où les enjeux prennent de l’ampleur. L’ensemble se referme dans un troisième acte plus introspectif, où les héroïnes affrontent leurs doubles déformés, métaphores ludiques de leur propre stagnation.
L’histoire reste cependant largement tributaire de la connaissance des jeux précédents. Les clins d’œil constants, les relations préétablies et le rythme narratif très “interne” peuvent nuire à l’accessibilité. De plus, l’absence de traduction française en limite l’impact pour les non-anglophones.
Quant aux scènes en réalité virtuelle — détachées de la trame principale — elles offrent des moments légers avec les déesses, sans incidence scénaristique. Sympathiques, certes, mais anecdotiques. Une bulle hors-narration, qui amuse autant qu’elle interroge.
Tactique en jupons, tempo sous contrôle
Le cœur de Megadimension Neptunia VIIR bat au rythme d’un système de combat repensé, plus exigeant, mais aussi plus structuré. Exit certaines facilités du précédent volet : ici, la gestion des points d’action (AP) et des points de compétence (SP) devient essentielle. Chaque mouvement, chaque attaque, chaque capacité spéciale consomme des ressources qu’il faut apprendre à économiser. Le résultat ? Des affrontements plus méthodiques, moins frénétiques, mais plus réfléchis.
Les combats s’organisent dans de petites arènes circulaires, où la position des personnages influence directement leur efficacité. L’aspect tactique s’intensifie : choisir la bonne formation, frapper plusieurs ennemis d’un coup, se replier en cas de danger. À cela s’ajoutent les “Giant Battles”, affrontements contre des ennemis titanesques sur des plateformes flottantes, qui modifient la portée des attaques et forcent à repenser ses habitudes de placement.
L’exploration reste fidèle aux codes de la série : zones cloisonnées, quêtes secondaires peu inspirées, objets cachés. Rien de neuf, mais une boucle de progression claire : récolter, combattre, équiper, grimper en niveau. Bonne surprise : les points de vie sont désormais restaurés automatiquement après chaque combat, évitant le grind fastidieux et allégeant la pression sur les soins.
En contrepartie, le jeu impose un framerate capé à 30 FPS, même sur PC. Un choix discutable, surtout pour un remaster, et plus difficile à justifier en dehors du mode VR. Les sensations en combat s’en trouvent parfois amoindries, notamment lors de chaînes d’attaques rapides ou de transformations.
Le contenu annexe reste léger. Les quêtes secondaires manquent de diversité, et les donjons recyclent des architectures déjà vues. Le game design reste prisonnier de son moteur narratif, préférant des mécaniques familières à une vraie prise de risque.
Une palette repolie, une partition en arrière-plan
Megadimension Neptunia VIIR ne révolutionne pas l’univers de Gamindustri, mais il en affine les contours. Le changement de moteur graphique — discret mais réel — permet un rendu plus net, moins saturé, débarrassé des excès de bloom qui diluaient les textures dans les précédents opus. Les modèles de personnages sont plus fins, les expressions faciales mieux définies, les animations légèrement assouplies, notamment en combat.
L’univers reste fidèle à lui-même : hypercoloré, saturé de motifs otaku, d’environnements stylisés et de donjons génériques. Les villes sont représentées par des hubs fixes, les zones explorables par des couloirs ornés de textures recyclées. Rien d’immersif, mais tout dans l’esthétique du pur produit Neptunia : une mise en scène de l’anime en temps réel, avec ce qu’il faut de clins d’œil aux consoles, aux genres vidéoludiques, et à leur caricature assumée.
La limitation à 30 FPS, même sur des machines puissantes, reste une anomalie. Elle bride la fluidité, surtout dans les combats où les enchaînements devraient être plus dynamiques. Ce verrou technique semble lié à la compatibilité VR — mais il pèse inutilement sur l’expérience hors casque.
Côté audio, la direction sonore reste fidèle à la série : musiques électro-pop légères, thèmes de combat nerveux, et quelques mélodies plus posées dans les arcs dramatiques. Rien de mémorable, mais une ambiance sonore qui colle parfaitement au ton du jeu. Le doublage japonais est excellent, porté par des performances vocales expressives. L’anglais, optionnel, reste de qualité correcte sans égaler la VO.
Les segments en VR bénéficient d’un travail sonore soigné, avec des ambiances de chambre virtuelles bien spatialisées. Mais cette attention ne suffit pas à compenser le manque d’impact global de la bande-son dans les moments clés du récit.
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