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Look Back est un film de 59 minutes du Studio DURIAN, réalisé par Kiyotaka Oshiyama, adapté du manga éponyme de Tatsuki Fujimoto. Il est sorti le 28 Juin 2024 et est désormais disponible sur Prime.
Fujino dessine depuis très longtemps pour la rubrique de son école. Ses mangas sont très appréciés, elle y inclut toujours beaucoup d’humour. Très satisfaite d’être encensée de toutes parts, son piédestal s’effondre lorsqu’une élève absente, qui prend ses cours par correspondance, décide de participer également. Fujino le prend d’abord à la rigolade ; dessiner un manga demande de la rigueur et un rythme soutenu. Kyômoto sort donc ses premières planches dans la rubrique de l’école. Et tous les élèves sont unanimes : elle a un niveau professionnel qui dépasse de loin celui de Fujino. La jeune fille ne peut l’accepter…
Avec acharnement, Fujino achète des manuels pour se perfectionner et dessine, encore et encore. Mais, mois après mois, les parutions de Kyômoto sont largement supérieures aux siennes en termes de qualité, peu importe le temps qu’elle investit pour s’améliorer.
Pendant plusieurs années, Fujino s’obstine. Sa famille s’inquiète : elle vit la majeure partie de son temps recluse dans sa chambre à dessiner, n’a plus d’amis, ne sort plus, consacre tout son temps à son art. Sa sœur lui conseille de la rejoindre dans son club de karaté, tandis que ses camarades se demandent quand cette lubie lui passera. Dessiner pour la rubrique de l’école, c’était amusant, mais le primaire se termine ; Fujino risque de se retrouver complètement seule et d’être considérée comme une otaku à son entrée au collège.
Au bout d’un certain temps, Fujino abdique. Elle laisse tomber le dessin et accepte de mener une vie dénuée de passion ; jusqu’à ce que son professeur lui demande de remettre le diplôme de Kyômoto, sa rivale qui l’a contrainte à abandonner son art. À contrecœur, la jeune fille y va.
Fujino rentre chez Kyômoto. La maison est vide, elle s’apprête à partir quand soudain, elle entend du bruit à l’étage. Curieuse, elle entre et monte. Dans le couloir, elle remarque des tas de carnets à croquis entassés là. Une planche de 4 cases encore vierge est posée non loin. Amusée, Fujino saisit un crayon et dessine une petite histoire : « Ne sors pas ! » « Sors ! » « Allez ! » « Kyômoto morte ».
À sa manière, Fujino lui montre qu’en restant enfermée dans sa chambre, Kyômoto mourra isolée. Le papier lui glisse des mains et se faufile sous la porte… Gênée, Fujino prend la fuite. Mais Kyômoto l’a récupéré, l’a lu et la poursuit dehors, pieds nus. Elle a du mal à parler, lui avoue que c’est sa plus grande fan, elle veut un autographe ; Fujino, qui n’a plus de papier sous la main, calligraphie son nom sur son vêtement. Kyômoto lui demande ensuite pourquoi elle a arrêté de dessiner, Fujino prétend qu’elle prépare un concours, qu’elle a des idées, mais que ce n’est pas encore couché sur le papier. Kyômoto fait preuve d’un tel enthousiasme que la jalousie de Fujino fond devant sa candeur.
La pluie tombe, éclaircissant son esprit. Kyômoto aime ce qu’elle crée. Un déclic se produit ; le dessin représente tellement pour Fujino ! Elle l’a abandonné pendant longtemps, mais Kyômoto lui a redonné l’impulsion. À peine rentrée, encore trempée, elle s’active sur ce nouveau projet, auquel se joindra bientôt Kyômoto qui s’occupera des décors.
Une formidable amitié émerge entre les deux jeunes filles, qui durera des années entières. Jusqu’à ce que Kyômoto rentre à la fac des beaux-arts pour se perfectionner… Fujino le prend mal, d’autant que leur série animée est sur le point de sortir.
Tout découle de ce petit bout de papier que Fujino a glissé sous la porte de Kyômoto. Sans lui, son amie serait restée dans sa chambre. 4 petites cases pour tout changer, qui servent à connecter l’ensemble de la trame.
Attention, je vais spoiler, donc ne lisez pas ce qui suit si vous souhaitez conserver la surprise !
ALERTE SPOIL
Fujino est adulte, elle a pris ses distances avec Kyômoto envers laquelle elle conserve de la rancœur pour avoir préféré rentrer aux beaux-arts plutôt que travailler avec elle. Fujino travaille dans son coin avec une baisse drastique de ses ventes au lancement de leur manga commun : « Shark Kick ». Elle persévère néanmoins, volume après volume, connaît des hausses, des baisses…
Puis, un beau jour, les informations télévisées parlent d’une attaque dans une école d’art. Un homme armé d’une pioche a massacré 20 personnes, 3 blessés ont survécu. Aussitôt, Fujino essaie de joindre Kyômoto, qui ne répond pas… Juste après, sa mère l’appelle pour lui annoncer la triste nouvelle… Kyômoto est morte…
Dévastée, Fujino se rend dans l’appartement de son amie. Elle retrouve le fameux papier qu’elle avait dessiné pour l’inciter à sortir et réalise soudain que Kyômoto a fait tous ces efforts pour elle. Surmonter sa phobie sociale, se parfaire pour fournir un travail de meilleure qualité afin que leur manga soit vraiment bon… Le poids de la culpabilité de Fujino est énorme. Elle fond en larmes, souhaite que son amie ne soit jamais sortie de cette chambre. Elle déchire le papier, ne laissant que la première case « Ne sors pas ! ». Le papier, comme la première fois, glisse sous la porte.
Et derrière… Kyômoto, plus jeune, le récupère en s’interrogeant. Elle ne doit pas sortir ? Elle s’abstient, ne rencontre donc pas Fujino. Mais elle trouve tout de même le livre qui lui donne envie d’intégrer la fac des beaux-arts plus tard. Kyômoto y étudie, jusqu’au jour où le meurtrier surgit. Mais, au lieu de mourir, Fujino vient la sauver grâce à ses cours de karaté. Une amitié s’établit aussitôt entre elles deux, comme si elles étaient destinées à être amies.
Kyômoto travaille avec Fujino ; ensemble elles dessinent cette belle histoire, celle dans laquelle Kyômoto ne meurt pas et se fait sauver à temps. Elles l’intitulent Look Back.
Retour au deuil : Fujino, de l’autre côté de la porte, reçoit ce fameux papier. Elle a empêché Kyômoto de se faire tuer, elle l’a sauvée et elles travaillent ensemble désormais. C’est bien son propre style de dessin sur ces cases. En ouvrant la porte, Fujino découvre de nombreux papiers accrochés, la fenêtre est ouverte.
Kyômoto ne fait plus partie de la vie de Fujino, qui poursuit son travail, jour après jour, heure après heure.
FIN DU SPOIL
Il faut saluer la maîtrise de la mise en scène. Incroyable, riche en idées, en couleur ; la patte graphique m’a fait penser à celle de Kon Satoshi, ce qui ajoute au charme global. Tatsuki Fujimoto est l’auteur de Chainsaw Man et je perçois des similitudes au niveau des nez, des effets dans la chevelure, mais surtout des bouches qui me font automatiquement penser à la patte de Kon Satoshi. Ce constat m’a davantage émue, j’ai pleuré la mort de Kon Satoshi en été 2010, Paranoïa Agent fait partie de mes cultes.
Le doublage VF est excellent, les musiques touchent le cœur ; elles renforcent l’émotion qui exsude à chaque minute de ce film.
« Dessiner, pourquoi au final ? » Question pertinente. Cela demande tellement de travail, un mangaka peut trimer toute la journée et en être toujours au même point le soir venu, comme Fujino le dit si bien. Ce serait plus simple d’en lire, tout simplement. Et pourtant… Elle aime dessiner, tout comme Kyômoto.
Il faut saluer la mise en scène, comme je l’évoquais plus haut, qui est de toute beauté. Notamment ce plan dans lequel toutes deux sont en couleur parmi les gens gris. Des gens qui ne font pas partie de leur vie, tandis que le ciel est bien bleu, le doré prédomine à cet instant. Le monde demeure vivant, et il n’y a plus qu’elles deux, les autres n’existent pas.
Ce film, au format de presque 1h, m’a captivée du début jusqu’à la fin. Il est fort, émouvant, si vivant qu’on est dans l’instant avec elles. Une magnifique découverte.