Depuis ses débuts en light novel et manga, Goblin Slayer a conquis les amateurs de dark fantasy par son univers impitoyable et ses récits où chaque décision peut mener au désastre. Avec Goblin Slayer -Another Adventurer- Nightmare Feast, la série s’aventure dans le domaine des RPG tactiques au tour par tour, un choix qui s’harmonise bien avec l’ambiance méthodique et stratégique de son monde. Mais ce saut dans l’arène vidéoludique parvient-il à retranscrire la tension et la brutalité de l’œuvre originale tout en proposant un jeu captivant pour les amateurs de stratégie ?
Dans Nightmare Feast, vous incarnez une jeune femme propulsée au rang de Maître de guilde dans une région éloignée du royaume. Héritant de cette position après la mort mystérieuse de son père, votre héroïne doit jongler entre les tâches administratives de la guilde et ses propres quêtes sur le terrain. En parallèle, une intrigue plus large se déploie autour d’un artefact légendaire capable de ressusciter les morts, attirant l’attention de factions variées, de sombres conspirateurs et de créatures surnaturelles.
Ce scénario, entièrement original, a été supervisé par Kumo Kagyu, le créateur de la série. Bien que l’intrigue reste centrée sur des thèmes classiques de la dark fantasy – survie, corruption, et sacrifices –, elle réussit à maintenir une cohérence et une intensité propres à l’univers de Goblin Slayer. L’écriture, bien qu’épurée, parvient à transmettre les dilemmes moraux et la gravité des décisions, un écho aux romans qui plaira aux fans comme aux néophytes.
Le pilier de Nightmare Feast réside dans ses combats tactiques au tour par tour. Chacune de vos unités, qu’il s’agisse de guerriers lourdement armés ou de mages fragiles mais puissants, dispose de compétences uniques et de statistiques à gérer minutieusement. Chaque affrontement demande une analyse constante : l’emplacement de vos unités, l’utilisation optimale de leurs compétences, et la compréhension des faiblesses ennemies peuvent déterminer l’issue de la bataille.
Le jeu introduit également un système de moral et de fatigue, simulant l’impact psychologique des quêtes prolongées sur vos aventuriers. Ce choix renforce l’idée que chaque victoire se paye au prix d’une préparation minutieuse et de sacrifices.
Cependant, bien que les mécaniques soient riches, certains combats souffrent d’un déséquilibre flagrant. Les ennemis peuvent parfois infliger des dégâts démesurés ou bénéficier d’avantages tactiques difficiles à contrer sans un grinding intensif. Ce déséquilibre peut frustrer les joueurs, même sur les niveaux de difficulté les plus accessibles.
Visuellement, Nightmare Feast s’imprègne des codes esthétiques de l’univers Goblin Slayer. Les environnements – des villages assiégés aux cavernes infestées de gobelins – sont riches en détails, avec une palette de couleurs sombres et des textures qui retranscrivent bien la brutalité et l’austérité de ce monde. Les personnages, dessinés par Noboru Kannatsuki, conservent leur style distinct, mêlant réalisme et caricature pour souligner les traits de leurs personnalités.
Les animations en combat méritent également d’être saluées : les sorts explosifs, les coups critiques et les défenses désespérées s’accompagnent d’effets visuels dynamiques qui renforcent l’impact de chaque action. Cependant, certaines textures moins travaillées trahissent les limitations techniques de la Nintendo Switch, particulièrement lors des séquences en extérieur.
La bande-son de Nightmare Feast joue un rôle crucial pour immerger les joueurs dans cette aventure sombre. Les thèmes orchestraux, souvent mélancoliques, soulignent la gravité des situations tandis que des morceaux plus énergiques accompagnent les batailles épiques. Les effets sonores – le craquement des armes, les incantations magiques, ou le hurlement des gobelins – renforcent l’immersion dans cet univers impitoyable.
Les doublages japonais, bien que globalement solides, présentent des performances inégales. Certains personnages bénéficient d’une interprétation convaincante, transmettant avec justesse la tension et l’urgence des situations. D’autres, en revanche, manquent de nuance, ce qui peut nuire à l’immersion dans les scènes clés. À noter également que le jeu ne propose qu’une traduction anglaise, ce qui peut représenter une barrière pour certains joueurs.
Un autre point fort de Nightmare Feast est sa gestion des héros. Chaque personnage peut être personnalisé en fonction de ses compétences, de son équipement et de ses traits passifs, vous permettant de construire une équipe adaptée à vos stratégies. L’acquisition de nouvelles armes, armures et artefacts est gratifiante, bien que parfois rendue laborieuse par le besoin de collecter des ressources rares.
Avec environ 30 heures pour compléter la campagne principale, le jeu offre une durée de vie respectable. Les quêtes secondaires, bien que moins nombreuses qu’attendu, ajoutent une variété bienvenue. Toutefois, leur design manque parfois d’originalité, se résumant à des missions de récupération ou d’élimination.
Le jeu excelle dans la tension qu’il impose : chaque décision de combat, chaque gestion de ressource, peut avoir des conséquences à long terme. Cela dit, cette difficulté accrue pourrait décourager les joueurs cherchant une expérience plus détendue.